Avec la Cimade, accueillir l’étranger
Accueillir l’étranger, c’est une oeuvre de Miséricorde.Témoignage de Jacqueline Bosc, catholique mariée à un pasteur protestant, engagée à la Cimade (Service Oecuménique d’Entraide). Par Chantal Joly.
« L’étranger a une place prépondérante dans la Bible qui est mon lieu de ressourcement. L’engagement à la Cimade est une mise en pratique de mes convictions qui me permet d’allier un double engagement, en tant que citoyenne et en tant que croyante. Les deux s’alimentent. C’est dans la mesure où je change de regard à travers l’Autre, que je ne l’enferme pas dans son statut d’étranger avec ses préjugés et que nous manifesterons ensemble des liens de fraternité, que le monde changera de regard », explique Jacqueline Bosc.
Voilà plus de trente ans qu’elle est investie dans cette association « dont la devise résonne en elle » : « L’humanité passe par l’autre ». Pour l’expliquer, elle évoque le terreau éducatif catholique classique qui « a façonné sa façon de voir» en terme d’attachement à la dignité de la personne et à ses droits fondamentaux et d’accueil inconditionnel de l’étranger, ainsi que son ancienne profession « dans le secteur social ». Le fait qu’elle ait épousé un pasteur l’a amenée, ajoute-t-elle, à « ouvrir une autre parenthèse » dans son parcours. Du soutien à une grève de la faim de Tunisiens à Nice à d’autres manifestations, sa route a en effet croisé l’association « aujourd’hui laïque mais aux origines portées par des mouvements de jeunesse protestants ». Et plutôt que de rejoindre d’autres organisations d’aide aux migrants et aux demandeurs d’asile, Jacqueline s’est engagée à la Cimade, « parce qu’elle se bat pour un monde plus juste plutôt que de chercher à leur donner du pain ou un manteau ». Et de citer cette parole entendue de la bouche d’un pasteur : « Il faut amener les étrangers à arracher leurs droits ». Cette mobilisation politique « goutte d’eau dans une mer d’indifférence » convient à son tempérament. C’est dans cette optique qu’elle travaille également dans divers collectifs afin de conjuguer les forces des associations.
Le rejet de l’étranger est un non-sens
Aujourd’hui présidente de la région Languedoc-Roussillon, Jacqueline mène surtout des actions de sensibilisation (dans des écoles, auprès de scouts, de paroisses, etc) en utilisant l’outil culturel (cinéma, théâtre, fête des voisins…). Elle épaule par ailleurs divers groupes qui se sont créés dans les Cévennes en vue de recevoir des réfugiés. Son rôle est « de témoigner plutôt que d’appeler à la pitié ». En expliquant notamment combien leur présence peut souder des communautés et revitaliser des villages. Elle tient à le redire : dialoguer avec d’autres cultures et religions permet « de s’enrichir intérieurement ».
Dans un contexte de fermeture et de peur vis-à-vis des migrants, Jacqueline aime citer l’épisode de la Genèse de Sodome et Gomorrhe qui « illustre bien le non-sens du rejet de l’étranger » et garde le cap sur « la promesse des Béatitudes ». Avec son mari aumônier de prisons -« deux univers qui s’entrecroisent »– elle se définit comme une « veilleuse au milieu de la nuit ». Sa foi l’aide…. « à regarder les lueurs du matin à travers les ombres ».