Mgr Pontier : « Nos devoirs envers les chrétiens d’Orient »
Président de la Conférence des évêques de France, Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille, invite les catholiques à être solidaires et accueillants envers les chrétiens d’Orient. Il plaide pour une plus grande écoute des acteurs de terrain par les responsables politiques. Par CLG.
Comment vivez-vous les contacts avec les responsables des Eglises d’Orient ?
Je suis au courant des événements en Irak par l’intermédiaire d’un dominicain à Marseille, le Père Jean-Marie Mérigoux. Il a passé une partie de sa vie à Mossoul et connaît très bien le contexte ainsi que de nombreuses personnes sur place. Il reçoit, de façon quasi quotidienne, des renseignements sur l’évolution de la situation, dont il me fait part. J’ai accueilli à Marseille Mgr Antoine Audo, évêque d’Alep, en Syrie. Je suis aussi en lien avec le Patriarche Gregorios III, chef de l’Église melkite-catholique, et avec Mgr Louis Sako, patriarche des Chaldéens.
Que représente pour vous le lien avec les chrétiens d’Orient ?
Il se situe dans l’histoire – longue de 2000 ans – de la présence chrétienne sur cette terre. Le drame que vivent les chrétiens d’Orient touche aussi l’ensemble de la population de ces régions. Nous voyons bien, dans ces pays à forte population, dirigés par des responsables de confession musulmane, la situation des minorités. Celles-ci subissent les conséquences du conflit interne à l’islam qui oppose Sunnites et Chiites. Le lien avec les chrétiens d’Orient s’inscrit dans le contexte global – politique et historique – mais aussi dans notre fraternité pour eux. Nos frères chrétiens sont là-bas depuis toujours, souvent sur des lieux très forts de l’histoire biblique et chrétienne. Le phénomène de l’émigration est dramatique. Les évêques de ces Eglises essaient de les encourager à rester.
Comment le diocèse de Marseille accueille-t-il les chrétiens orientaux ?
Il existe une tradition d’accueil à Marseille. Les communautés de rite oriental y sont présentes depuis très longtemps. Suivant les aléas de l’histoire, telle ou telle communauté a souffert le plus : Libanais, Arméniens… Actuellement, la paroisse des Assyro-chaldéens vit des moments douloureux. J’observe pourtant une grande solidarité et un courage inouï. Les communautés de rite latin sont très sensibles à leur vie. Elles sont en lien avec les paroisses proches.
Quel est votre message aux communautés chrétiennes ?
Notre premier devoir est celui de l’information. Nous sommes à une époque où l’information circule, sans que nous puissions contrôler ce qui nous est dit. J’encourage les chrétiens de France à la prudence et à la vérification des informations. Le deuxième devoir est celui de la prière pour ces communautés, tous les dimanches, lors de la prière universelle. Notamment dans les centres mariaux qui nous unissent à eux de façon très forte. Ensuite, nous avons un devoir de solidarité, par le biais des associations qui travaillent au soutien matériel des communautés chrétiennes dans ces pays. Il nous faut aller jusque-là, jusqu’à ce partage matériel. Le dernier point est l’accueil. Dans la mesure où des chrétiens de ces communautés arrivent chez nous, ne jugeons pas leur décision mais essayons de les accueillir, de les comprendre et de les aider autant que faire se peut.
A quoi souhaitez-vous sensibiliser les responsables politiques ?
On voit bien que la compréhension des événements au Moyen-Orient est mouvante, à cause de la radicalisation de certains groupes qui utilisent la violence. On peut souhaiter que nos responsables politiques entendent toutes les opinions et toutes les analyses ; qu’ils soient sensibles aux messages que leur transmettent, lors de leurs voyages, les responsables religieux, en particulier chrétiens, qu’ils rencontrent pour leur donner leur éclairage d’hommes de terrain, fin connaisseurs de l’histoire de ces pays. Que l’on ne reste pas dans la géopolitique trop lointaine qui finalement se retourne contre les autochtones à cause d’alliances pas toujours heureuses.
Les Chrétiens d’Orient à Marseille
Arméniens : A Marseille depuis le Moyen Age, avec de nouveaux arrivants depuis l’indépendance de l’Arménie en 1991. 80 000 fidèles, dont 1% de catholiques (1 paroisse).
Orthodoxes grecs : 10 000 fidèles. 3 lieux de culte dont l’église de la Dormition depuis 1835.
Orthodoxes roumains et russes : Petites communautés. 2 lieux de culte mis à disposition par le diocèse.
Coptes orthodoxes : Une cinquantaine de familles d’origine égyptienne, arrivées depuis les années 80. 1 lieu de culte.
Melkites ou grecs-catholiques : Plus de 2 000 fidèles, en majorité Libanais et Syriens. Première émigration en 1801. L’église Saint-Nicolas-de-Myre a été inaugurée en 1821. Depuis le début de la guerre, de nouveaux arrivants en provenance de Syrie.
Maronites : 2 000 fidèles. Installés depuis le début du XXe siècle, avec une seconde vague à partir de 1975. 1 paroisse.
Chaldéens : 1 500 fidèles. Premiers arrivants au début du XXe siècle, puis les Irakiens chassés de leur pays par la guerre. 1 paroisse.