Spiritualité et septième art | Documents épiscopat
Documents Épiscopat propose ici de porter un regard chrétien sur les productions cinématographiques et d’étudier ces relations parfois polémiques – voire conflictuelles – sous l’angle historique, théologique, christologique, pastoral, spirituel, pédagogique et ecclésial. L’on voit ainsi que les salles obscures nous renvoient l’image du monde et de la société, reflétant aussi notre propre image dans ce qu’elle a de meilleur et, parfois, de pire.
Édito de Monseigneur Norbert Turini
Depuis le commencement de l’histoire du cinéma, l’Église a toujours entretenu des liens avec le 7e art. De la méfiance des débuts à l’ouverture d’aujourd’hui, en passant par des rapprochements, des engouements et des mises à distance, ce rapport mouvementé entre Église et cinéma a permis néanmoins une belle fécondité si l’on en juge, actuellement, par le nombre important de festivals chrétiens du cinéma, la distribution de films d’inspiration chrétienne, des retraites cinéma, des cinés débats, etc.
Comment ne pas citer l’association SIGNIS, qui compte des jurys œcuméniques et interreligieux dans plus de trente festivals dans le monde ? C’est justement grâce à ces liens entre l’association SIGNIS, le jury œcuménique présent au Festival du film à Cannes depuis près de quarante-sept ans et le Conseil pour la communication de la CEF, qu’est née notre « Instance cinéma ».
Même si les relations entre Église et cinéma furent parfois très polémiques, voire conflictuelles et qu’elles ont pu connaître des hauts et des bas, comme le rappelait le pape François dans un discours du 7 décembre 2019 à l’association catholique des opérateurs-Sale[1] : « Un film peut-être un moment de communion de formation et d’éducation ».
Je tiens à remercier tous les auteurs qui ont contribué à la publication de ce numéro de Documents Épiscopat « Eglise et cinéma ». Ils ont finement analysé ce rapport sous l’angle historique, théologique, christologique, pastoral, magistériel, spirituel, pédagogique et ecclésial. Ils posent, dans leurs divers domaines de compétences, un regard chrétien sur le 7e art : « fenêtre ouverte sur le monde et miroir du cœur humain » pour reprendre la belle expression de Sr Geneviève Roux, xavière.
Ce numéro passionnant nous permet de mesurer le chemin parcouru mais aussi la nécessité de maintenir et de resserrer le dialogue entre Église et cinéma. Il est une invitation et surtout une nécessité à le poursuivre.
Alors que les salles obscures viennent tout juste de rouvrir en raison de la crise sanitaire et que de nombreux festivals ont été annulés ou reportés, ce numéro nous permet de réfléchir, de préparer et d’écrire une nouvelle page de cette passionnante relation entre l’Église et le cinéma et des nouveaux fruits qu’elle peut produire dans les temps à venir.
Le 7e art nous renvoie l’image du monde, de la société, mais il reflète aussi notre propre image dans ce qu’elle a de meilleur et de pire. Porter un regard chrétien sur un film, c’est nous efforcer de le regarder avec le regard du Christ pour déceler au détour d’une scène, d’un dialogue, d’une rencontre, d’un silence, d’un paysage, ce que l’on perçoit de la grandeur, de la dignité humaine, du bonheur de l’homme et de sa destinée ultime au milieu de ses blessures, de ses contradictions, de ses besoins, de ses aspirations et de ses espérances.
Pour terminer, je me permets de vous partager l’émotion que j’ai ressentie au moment de la projection du film La vie est belle de Roberto Benigni sorti en 1997. Ce film, non religieux, est une œuvre de Salut. Benigni y raconte l’histoire d’un père de famille qui, à travers les horreurs de la guerre et de la déportation, s’ingénie à embellir la vie de son fils : au-delà de l’horreur des camps, de la promiscuité avec les autres détenus, au-delà de la tragédie de la souffrance, de la torture et de la mort.
Toute cette misère humaine est dépassée, sublimée, transcendée par l’amour de ce père qui se fait le sauveur de son fils en y laissant la vie. Plus que sauver l’existence de son enfant, en utilisant le moyen du jeu, il lui ouvre un chemin d’avenir, justement là où tout était perdu, fini, sans espoir. Ce film est sublime parce qu’il nous montre la beauté de l’amour qui sauve.
Le sacrifice du père, dans ce film, actualise pour moi la confession de Paul dans l’épître aux Galates avec laquelle je conclus : « Ce que je vis aujourd’hui dans la chair, je le vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi » (Ga 2, 20).
+Norbert Turini, évêque de Perpignan-Elne
président du Conseil pour la communication de la CEF
[1] http://www.vatican.va/content/francesco/en/speeches/2019/december/documents/papa-francesco_20191207_acec-sdc.html et traduction en français sur Zenith https://fr.zenit.org/2019/12/07/le-cinema-est-un-instrument-de-communion-souligne-le-pape/
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