Bienheureuse Marie-Céline de la Présentation (1878-1897)
Le rayonnement de l’amour dans le quotidien
Morte de tuberculose à 19 ans, un an après son entrée au couvent des clarisses de Talence, elle a été proclamée bienheureuse le 16 septembre dernier à Bordeaux.
Qu’est-ce qui a amené l’Église à déclarer bienheureuse cette jeune clarisse, morte à 19 ans ? Ceux pour qui sainteté signifie vie héroïque, actions hors du commun, enseignement spirituel éminent seront déçus, car rien dans la vie de cette jeune fille ne correspond à ces traits.
Reconnaissons pourtant que la courte vie de Germaine Castang (qui recevra plus tard en religion le nom de Marie-Céline de la Présentation) a été particulièrement dure. Les épreuves ne lui ont pas été épargnées. Épreuves physiques tout d’abord. À quatre ans et demi, étant restée trop longtemps dans l’eau froide d’une rivière, elle en aura le pied déformé. Ce handicap sera longtemps un obstacle à son accueil dans une congrégation, alors qu’elle aspirait tant à être religieuse. De santé fragile, elle mourra, comme d’autres membres de sa famille, de tuberculose pulmonaire. Aux épreuves physiques s’ajoutent les épreuves familiales. Son père étant incapable de rembourser ses dettes, la petite épicerie qu’il tenait et la maison familiale seront saisies et toute la famille devra aller vivre dans une masure insalubre. Le froid, la faim, la maladie, la mort de frères et sœurs plus jeunes seront au rendez-vous. On peut dire que Germaine a vécu ce qu’on appellerait aujourd’hui une vie du quart monde.
Ce qui fait le rayonnement de celle que l’Église a déclaré bienheureuse, c’est sa foi et sa confiance en Dieu. Depuis toute petite, elle accueille jour après jour son amour et se donne à Lui. Elle puise dans la prière sa force, son endurance dans l’amour et sa persévérance. Bien sûr, sa première communion, son entrée chez les clarisses, son acceptation au noviciat puis sa profession solennelle faite avant sa mort révèleront quelque chose de l’intensité de sa vie avec le Seigneur. Mais c’est sa vie quotidienne qui est le lieu de sa réponse et de son union à Dieu. Elle aide, elle sert, elle prend sur elle, elle patiente, elle voit surtout le bien des autres. En un mot, elle aime en actes et en vérité. La sainteté, c’est l’accueil de cet amour du Seigneur en soi. Marie-Céline vient nous dire qu’elle peut être vécue à tous les âges de la vie. Elle nous rappelle aussi que la fécondité évangélique n’est pas du même type que l’efficacité humaine. Elle surgit d’un cœur qui s’ouvre totalement à l’action et à l’amour de Dieu. Elle est le fruit d’une vie qui se donne, se livre avec le Christ et accepte de passer par la mort comme le grain tombé en terre (Jn 12, 24).
Cardinal Jean-Pierre Ricard
Archevêque de Bordeaux