« Préparer les chemins du Seigneur » par Mgr Ginoux

L’Avent : quatre semaines de veille

Mgr Bernard Ginoux

Le temps de l’Avent qui marque le début de l’année liturgique (cette année l’année B où nous lirons l’évangile selon saint Marc) est un don qui nous est fait pour nous préparer à la fête de la Nativité (et non pas pour fêter Noël avant l’heure !).
Quatre semaines sont là pour nous faire découvrir la venue de Jésus, le Fils de Dieu fait homme, sur la terre. C’est une invitation à mieux le connaître, à répondre à la question « D’où viens-tu, Seigneur ? » et à rencontrer divers personnages de la Bible : Elisabeth et Zacharie, Jean-Baptiste, Anne et Joachim, le roi Hérode, les mages, et, bien sûr, Joseph et Marie autour de Jésus.
 
Depuis la Création, Dieu vient vers l’homme. D’abord il le crée, gratuitement, par pur amour pour lui faire partager ce qu’Il est. Dieu n’a pas besoin de l’homme : la vie trinitaire (Père, Fils, Esprit-Saint) est la plénitude de la relation d’amour. Mais, parce qu’il est amour, Dieu se communique et c’est ce qui permet l’apparition de l’homme « créé à l’image de Dieu et à sa ressemblance », fait pour vivre un échange perpétuel d’amour avec Dieu. Or, l’homme doutera de cet amour gratuit et s’éloignera de Dieu par le péché, la rupture d’alliance : « En Adam tous ont péché » écrit Saint Paul. Dieu, pourtant, ne cesse de vouloir rejoindre l’humanité. Toute la Bible manifeste comment Dieu se fait proche dans l’alliance scellée avec son peuple.
 

Le temps du désir et les « cantiques »

Les croyants de l’histoire sainte d’Israël ont répondu à cet appel depuis Abraham et les patriarches jusqu’à ces « pauvres du Seigneur » qui « attendaient la consolation d’Israël » (Luc 2,25) comme le vieillard Syméon qui prophétisera au moment de la présentation de l’Enfant Jésus au Temple et délivrera son cantique d’action de grâce, le « nunc dimittis » (Luc 2, 29- 35). Ce sont ces fidèles du Seigneur qui ont au cœur le désir de sa venue. Un autre cantique exprimé par la bouche de Zacharie traduit la joie de la venue du messie-sauveur annoncée par la naissance de Jean-Baptiste, le précurseur : le cantique du Benedictus (Luc 1, 67-79). Enfin, le plus connu de ces cantiques est le Magnificat (Luc 1, 46-56), celui de la Vierge Marie : l’enfant qu’elle porte est le signe de la miséricorde de Dieu « qui s’étend d’âge en âge ».

Marie, comme Zacharie ou Syméon, voit dans cet enfant l’accomplissement de la promesse de Dieu faite à leurs pères. Ainsi le désir que Dieu manifeste pour sauver l’homme du péché est-il réalisé dans cette venue d’un enfant qui est la miséricorde vivante de Dieu incarnée en Jésus-Christ. Alors tous ceux qui sont dans l’attente du Sauveur peuvent ouvrir leur cœur à sa venue.
 

Comment attendre la venue du Sauveur?

L’un des mots qui revient souvent dans la Parole de Dieu entendue dans la liturgie de l’Avent est le mot « veillez ». Au fond, le temps de l’Avent nous rappelle que la vie chrétienne tout entière est une veille. Nous veillons parce que nous savons que « le Seigneur vient ». En nous demandant la vigilance, Jésus nous invite à vivre dans la foi selon l’Esprit-Saint qui nous est donné. La foi nous rend solide et nous fait saisir que « Dieu est fidèle dans l’attente où vous êtes » écrit saint Paul (1 Co 1,3 – 9). Ce qui nous endort c’est le monde avec ses discours, avec ses manières de penser et de juger. Veiller pour accueillir le Seigneur demande un effort de conscience, de prière, de conversion du cœur, de fréquentation de la Parole de Dieu, de fidélité à l’eucharistie et au sacrement de réconciliation. Les personnages bibliques qui attendent le Sauveur et qui le reconnaissent sont des veilleurs : ils préparent leur cœur à sa venue.

Tout en faisant de légitimes préparatifs de fête, quelle attitude allons-nous développer pendant ces jours de l’Avent ?

La veille du chrétien est déjà une action de grâce avec Marie et le Magnificat : reconnaître l’œuvre de Dieu pour l’homme, louer le Seigneur de son amour gratuit et de ce que j’en reçois sans cesse. Nous veillons aussi à travers notre quotidien mais un quotidien vécu en perspective : nous attendons le retour du Seigneur dans sa gloire pour un « règne qui n’aura pas de fin ». Notre vie – et la vie de toute l’humanité – s’inscrit dans ces « fins dernières » et donc nous vivons déjà du « monde à venir ». Le temps de l’Avent est le temps du désir parce qu’il est aussi le temps de l’espérance : la bienheureuse espérance qui est « l’avènement de Jésus-Christ notre Sauveur » (liturgie eucharistique).

Le chrétien est par essence un veilleur parce qu’il se prépare au rendez-vous avec celui qui vient. Mais si « celui qui vient » est toujours le Christ, il s’identifie au pauvre, au petit, à celui qui a faim, qui est malade ou rejeté, à tous ceux que nous risquons de ne pas voir dans l’agitation de nos désirs et de nos quêtes égoïstes.
 
Mgr Bernard Ginoux,
Evêque de Montauban

Sur le même thème