Je suis Marie de Béthanie, la soeur de Marthe et de Lazare

Familière de la mort, je suis l’émerveillée de la Résurrection.
Quand le maître est venu pour la première fois dans notre maison,
Marthe s’agitait pour rien : elle pensait le servir, et moi je l’écoutais.
Assise à ses pieds, j’ai appris à ouvrir l’oreille de mon cœur.
Je suis la femme de l’écoute.
Je suis la femme qui a choisi la meilleure part.
Mais voilà, notre maître s’est absenté, et mon frère Lazare est mort.
Nous l’avons enseveli dans nos larmes et mis au tombeau.
Notre maître l’a su et il s’est mis en marche.
Quand il est arrivé, quatre jours après, au village,
Marthe l’a accueilli, a couru vers moi et m’a dit :
« Le maître est là, et il t’appelle ».
Obéissante, j’ai accouru, les yeux en larmes.
Ému, notre maître s’est rendu au tombeau de Lazare.
D’une voix ferme, il a demandé à mon frère de sortir.
Quand Lazare est sorti du tombeau, le maître a dit :
« Déliez-le et laissez le aller ».
Moi qui ne savais comment servir, j’ai su alors quel était mon service.
Première en chemin, je suis la servante de la Résurrection.
Je suis la femme habitée par le pressentiment de la mort.
Je suis la femme habitée par le sentiment de la vie.
Je suis, de toute éternité, la femme qui sait et qui embaume.
Quand il revint au village, je pris un flacon d’albâtre et un parfum précieux.
Je le versai sur ses pieds en pleurant, et les essuyai avec mes cheveux.
Jésus, notre maître, n’encourrait-il pas la mort pour nous sauver la vie ?
Ses disciples m’ont rabrouée : ce nard n’était-il pas de grand prix ?
Mais le maître a salué mon geste, car il m’avait comprise.
Nous étions deux à savoir que l’heure du Sauveur était enfin venue.
Nous étions deux à savoir que la porte de la mort allait bientôt s’ouvrir.

Écrivaine : Charlotte Jousseaume
Illustratrice : KOVA

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