Chronique d’Amérique latine : « Vie religieuse et mission au Brésil »
Elles vivent dans leur petite maison au milieu d’un quartier bien ordinaire, tout près du fleuve qui traverse la ville. Belo Horizonte, qui comme son nom ne l’indique pas, ne débouche sur aucune vue splendide que peut offrir l’Amérique du Sud, les bords de l’océan ou les hauts sommets andins, sinon sur des horizons étonnants que ces petites Sœurs de Jésus ont fréquentés.
Toutes les trois ont vécu longtemps dans des hauts lieux de désolation ou de pauvreté du Brésil. L’une d’elle, Paule, a navigué entre Fortaleza, en plein Nordeste chaud et désertique, et la belle Rio de Janeiro au nom enchanteur… dans une favela devenue fameuse depuis son « nettoyage » par les forces de police qui voulaient éliminer les réseaux de drogue !
A côté d’elle, Elizabeth, une petite sœur vraiment petite, qui a vécu de longues années dans la forêt de l’Amazonie avec une tribu indienne en voie de disparition, les « Tapirape ». Quelle émotion pour moi de rencontrer une de ces Petites Sœurs, témoin de cette histoire extraordinaire et méconnue, que j’avais découverte dans un livre, simple « diaire » des petites sœurs, publié en France voici un an à peine… Grâce à la présence de cette petite communauté, plantée là par Petite Sœur Magdeleine, la fondatrice des Petites Sœurs de Jésus, cette tribu a survécu et est passée de 50 à 500 membres ! Présence humble et discrète, sans prosélytisme, et qui pourtant donne vie ! N’est-ce pas une forme d’Évangélisation ?
Enfin, petite sœur Joëlle, qui habite dans une communauté de l’État de Bahia, dans le Nordeste du Brésil, cette fameuse baie, qui n’est pas que celle du tourisme ! Elle raconte la pauvreté qui envoie « en exil » à Sao Paulo, capitale économique, la jeunesse de ces régions dépeuplées. Comme une lente hémorragie. Accompagner la vie de ceux qui restent, de ceux qui ne peuvent partir ailleurs, n’est-ce pas une façon de dire que la vie est plus forte ?
Une « biodiversité humaine » en train de disparaître
En juin prochain, se tiendra à Rio, le sommet de la Terre « Rio + 20 » qui réunira les grands de ce monde pour sauver la diversité de la planète, et spécialement celle de l’Amazonie, le « poumon » du globe. Et sur cette même terre brésilienne, la « biodiversité humaine » est déjà en train de disparaître ! Comme une mécanique implacable, les régions pauvres s’appauvrissent, les terres sont dédiées à la monoculture industrielle qui exporte sa production et vide les terres de ses paysans qui sont « sans terre ».
Au milieu de ces grands bouleversements humains que l’on touche du doigt dans cet immense pays, la vie religieuse est présente. Une présence multiforme, mais toujours aux confins du supportable. Il faudrait vous décrire par le menu les visages et les vies de ces hommes et de ces femmes que j’ai rencontrés au Brésil. Tous ont en commun d’habiter ces zones où l’homme est tenu pour quantité négligeable, où la vie ne vaut pas cher, où la mort semble régner. Et pourtant, il y a de la vie. Et pourtant, il y a de la dignité ! Ce sont des liens tissés au quotidien, sur de longues années. Cette présence, davantage qu’une mission, ne serait-elle pas une parabole du Royaume de Dieu ? Elle est une marque de la vie religieuse, par ces hommes et femmes qui se consacrent au Seigneur « pour le Royaume ». Elle en est sa manifestation !
En Amazonie. Renaissance de la tribu indienne des Tapirapé
Par les Petites Sœurs de Jésus. Journal d’une fraternité. Ed. KARTHALA. Collection : Signes des Temps.
Ce livre est le « récit au quotidien » des Petites Soeurs de Jésus qui font une analyse quasi ethnologique d’une tribu d’Indiens d’Amazonie.