Franz Stock, figure de la réconciliation franco-allemande

Franz Stock
En 2013, le diocèse de Chartres célébrait le 50e anniversaire du transfert de la sépulture de Franz Stock (1904-1948) en l’église Saint-Jean-Baptiste de Rechèvres à Chartres. Aumônier des prisons de Paris de 1941 à 1944, il apporte un soutien moral et spirituel aux détenus, prépare et accompagne les condamnés à mort jusqu’au Mont Valérien, lieu d’exécution de nombreux résistants. Rencontre avec Mgr Michel Pansard, ancien évêque de Chartres et actuel évêque de Corbeil-Essonnes pour évoquer la figure de ce prêtre allemand hors du commun.
En 2024, à l’occasion de la panthéonisation du résistant Missak Manouchain et de femme Mélinée, nous vous proposons de relire cet article. Il fut accompagné dans ses derniers moments à la prison de Fresnes et jusqu’au poteau d’exécution par l’Abbé Franz Stock.

Qu’est-ce qui caractérise la figure de l’abbé Franz Stock ?

Franz Stock est une personnalité marquante. C’est une belle figure humaine, chrétienne et de prêtre, au cœur de la période troublée, dramatique de la Seconde Guerre mondiale. C’est un artisan de la rencontre, un artisan de réconciliation. Il a su gagner la confiance, sans jamais la trahir, des personnes que les circonstances de la vie ont mises sur son chemin. En particulier, lorsqu’aumônier des prisons parisiennes de Fresnes, du Cherche-Midi et de la Santé, il visite, dès 1941, tous ceux que les nazis arrêtent, ou encore lorsqu’il accompagne les condamnés jusqu’au poteau d’exécution au Mont Valérien. Il était là, vivant l’Évangile – « J’étais en prison, et vous m’avez visité » (Matthieu 25) – , présent auprès des hommes, jusqu’au bout.

Franz Stock, aumônier allemand de la seconde Guerre mondialeQue s’est-il passé au Coudray, près de Chartres ?

En 1944, Franz Stock est lui-même fait prisonnier de guerre. Quelques temps après, il prend la tête du « séminaire des barbelés », qui rassemble des étudiants en théologie allemands en captivité en France. Là, il réalise non seulement le travail du supérieur, mais il prépare aussi les jeunes hommes à être « dès demain des saints dont le monde a besoin », selon les mots de son beau discours d’adieu du séminaire qui n’a perdu ni sa force ni son actualité. Il précise d’ailleurs de quelle sainteté il s’agit, en évoquant ceux qui ont l’expérience d’une vie rude et qui peuvent témoigner d’une appartenance plus large que celle du seul État ou de la nation. Dans ce texte, il évoque un monde à la croisée des chemins avec le choix de sombrer dans la barbarie ou celui de porter le message de liberté, de paix et d’amour. Le séminaire des barbelés a compté neuf cent cinquante séminaristes entre 1945 et 1947. Six cent trente d’entre eux furent ordonnés prêtres.

Comment la figure de Franz Stock touche-t-elle aujourd’hui vos diocésains ?

Je suis frappé du rayonnement particulier qu’il exerce. Près de sa tombe, installée depuis le 15 juin 1963 en l’église Saint-Jean-Baptiste de Rechèvres, elle-même construite en 1961 pour la réconciliation franco-allemande, au nord-ouest de la ville de Chartres, un livre d’or est mis à la disposition des fidèles et des passants. Des personnes y écrivent régulièrement quelques mots de reconnaissance. Elles racontent comment Franz Stock a aidé des membres de leurs familles et quel soutien, secours et réconfort il a été. Des prêtres viennent là également demander son intercession. Je vois à Chartres des personnes qui lui sont profondément attachées. Cette figure, cet artisan de paix et de réconciliation rejoint nos contemporains face à notre monde aujourd’hui encore tendu et qui connaît toujours nombre de situations de guerre. C’est une figure qui parle à tous. C’est un homme de la rencontre, à la suite de celle de Jésus avec la Samaritaine au puits de Jacob et comme le synode pour la Nouvelle Évangélisation nous y invite à sa suite. C’est une figure de la rencontre possible, là où à vue d’homme cela semblait impossible.

Quel message lègue-t-il pour la construction européenne ?

Franz Stock est mort en 1948, évitons tout anachronisme ! Mais il est clair que c’était un francophile et l’un des pionniers d’un chemin possible de réconciliation franco-allemande. Très marqué par la Première Guerre mondiale, il a toujours travaillé au rapprochement des deux pays, y compris dans la mouvance franciscaine, jusqu’à venir faire ses études en France à une époque où c’était quasiment inconcevable. Enfin, la veille du transfert de sa dépouille à Chartres, le traité de l’Élysée, traité d’amitié franco-allemand dont nous fêtons, cette année, le cinquantième anniversaire, est ratifié. Aujourd’hui, nous souhaitons rendre hommage à Franz Stock et faire découvrir par lui un modèle d’authenticité spirituelle aux jeunes générations. L’ouverture de son procès en béatification, en novembre 2009, a été célébrée en France et en Allemagne, et depuis nous pouvons l’appeler serviteur de Dieu. J’espère que, par sa vie donnée, l’Église le reconnaîtra bienheureux.

 

Prier 15 jours avec l’abbé Franz Stock, apôtre de la réconciliation

Ce recueil de prières permet de d’entrer dans la spiritualité de Franz Stock, nourrie d’amour fraternel, de paix et de réconciliation. Par sa vie, il témoigne de la fraternité universelle, et invite à dépasser antagonismes et conflits pour rendre le monde plus humain.

Là où tu es, fais ton devoir, joue le rôle qui t’attend, ne va pas chercher ailleurs, répond à l’appel de tes frères

Franz Stock

Par Jean-Pierre Guérend, éd. Nouvelle Cité, collection Prier 15 jours.

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