Guerres mondiales : L’Église fait mémoire à sa façon

L’Église s’associe au grand cycle de commémorations qui mobilise notre pays pour le Centenaire de la Première Guerre mondiale et le 70ème anniversaire de la Libération. Plusieurs diocèses ont trouvé une belle manière d’apporter leur pierre à ce mémorial du souvenir.

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Pour le diocèse de Strasbourg (photo), frontalier de l’Allemagne, europhile, les commémorations ont une résonance particulière. « Notre histoire commune est très longue », rappelle le chanoine Jean-Luc Liénard, le vicaire épiscopal. Il évoque les nombreux jumelages entre paroisses et des participations à des pèlerinages (la Fête-Dieu en Allemagne) des deux côtés du Rhin, la messe en allemand à la cathédrale de Strasbourg le samedi, les temps communs de réflexion des évêques de Strasbourg (France), Bâle (Suisse) et Fribourg (Allemagne), l’accueil des jeunes « qui s’est fait de manière transfrontalière » lors de la rencontre européenne de Taizé en décembre 2013. La coopération transfrontalière entre la zone pastorale de Strasbourg, les catholiques de Kehl et du doyenné d’Offenburg, est régulière. Pour cette année spécifique les familles franco-allemandes se réuniront le 24 mai à Kehl sur le thème « Tu nous laisses la paix ». Par ailleurs, c’est Mgr Karl-Heinz Wiesemann, l’évêque de Spire, francophone, qui prêchera à la cathédrale de Strasbourg pour la « Messe pour la France » du 14 juillet !

Le diocèse de Verdun, se retrouve, bien sûr, à l’épicentre du Centenaire de la Première Guerre mondiale. « Sur ces terres de Meuse qui affichent le triste record de plus de 520.000 morts, toutes nationalités confondues, nous apporterons un regard chrétien centré sur l’humain », explique l’économe du diocèse, Vincent Noailles. Le groupe du Centenaire dont il fait partie travaille sur plusieurs initiatives, telle celle qui vise à « sortir de l’anonymat les hommes qui ont souffert dans cet enfer en permettant à des personnes de tous les diocèses d’avoir accès à une liste des soldats morts pour la France pour les parrainer via une pensée, une prière ou l’offrande d’une messe, le jour du centenaire de leur sacrifice ». Déjà, dimanche 22 juin 2014, sur le site de l’ossuaire de Douaumont, des lectures de textes d’écrivains et de prêtres aumôniers, témoins directs de cette époque, rythmeront une balade découverte des lieux.

Le diocèse de Coutances a exhumé d’archives paroissiales et d’albums photos privés une histoire rarement montrée : la vie chrétienne au cœur de la période charnière 1944-1945, des bombardements aux reconstructions : communiants aux tenues soignées posant devant des ruines, processionnaires de la Fête-Dieu heureux de pouvoir vivre leur foi au grand jour, mariés dans des églises remplies d’échafaudages, funérailles de victimes civiles, militants de l’action catholique actifs dans la collecte de vêtements et de victuailles pour les réfugiés, baraquements en guise de lieux de culte provisoires. « Beaucoup de personnes s’y reconnaissent. Ces photos ont valeur universelle. C’est très touchant », commente Anne Jacquemot, la directrice diocésaine de la communication qui a piloté cette opération de « La valise oubliée ». C’est en effet dans une valise, à l’image de celle où furent retrouvés les négatifs de la guerre d’Espagne de Robert Capa, qu’environ 200 clichés ont été collectés au cours de février et mars dans les doyennés. Scannées dans le cadre d’un partenariat avec les Archives départementales, scénographiées par un studio professionnel, agrandies, elles seront visibles dans la cathédrale de Coutances du 6 juin aux Journées du Patrimoine (20 et 21 septembre), avant de circuler dans le diocèse. Anne Jacquemot note que « l’exposition sera accessible aussi aux visiteurs étrangers, notamment anglais et allemands tant le langage photographique se passe de traduction ».

Un art ecclésial de la mémoire

« L’Église fait mémoire à sa façon mais à partir d’un socle commun à tous […] Elle ajoute sa manière de faire à celles des autres pour les féconder ou pour les purifier » écrit Mgr Luc Ravel, évêque aux Armées françaises, dans Cent ans après mémoire chrétienne de la grande guerre (Documents Épiscopat n°3/2014). Introduit par une citation du Pape François – « Le croyant est fondamentalement quelqu’un qui fait mémoire » (Évangelii gaudium, 13) – ce texte explique sur quels principes s’appuie l’Église pour mener ce travail de réflexion sur le temps, l’histoire et la mémoire. Il relit quelques faits sur lesquels jeter une lumière prophétique et suggère des actions concrètes.

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