Visages et témoignages de chrétiens auprès des Roms

Laïcs, prêtres, religieux et religieuses, ils sont des centaines en France à incarner une Eglise qui se soucie des plus rejetés parmi les rejetés. Portraits de quelques-uns de ces frères et sœurs en fraternité.

Se laisser pousser par l’Esprit

Responsable du conseil diocésain de solidarité, Marie-Thérèse Vogler s’occupe d’un des terrains de Créteil où des Roms, déjà chassés d’un autre lieu, sont encore menacés d’expulsion. Elle dit agir « ni par raison ni par politique » -bien qu’elle ait été vice-présidente de la communauté d’agglomération chargée du logement des plus démunis et des Gens du Voyage. Elle dit agir là, tout comme dans d’autres situations, poussée par l’Esprit, et cite l’Epître aux Galates (5, 16-17). Elle reçoit par les Roms « la joie de vivre l’Evangile, de rencontrer le Christ souffrant ». Plusieurs fois par semaine, elle vient -mais elle n’est pas la seule- domicilier les familles afin qu’elles puissent avoir l’AME, apporter du lait ou des couches pour les enfants, véhicule des mamans à la PMI, veille aux photos d’identité et aux vaccinations pour les inscriptions à l’école…. Elle est membre d’un comité de soutien inter-associatif et si elle vient de co-organiser une soirée d’information à la demande de Mgr Michel Santier, évêque de Créteil, sur cette population qu’elle découvre « très attachante, très hospitalière », elle s’avoue « désespérée de l’indifférence de la majorité des catholiques à son égard ».

Se battre pour ses valeurs

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Malgré les agressions verbales lors de débats et les critiques de donateurs, Claire Sabah assume « sans états d’âme » sa mission de chargée de projets Etrangers-Roms-Gens du voyage au Secours Catholique. Elle s’attendait juste à « plus de soutien sur des valeurs claires et inconditionnées vis-à-vis de ces pauvres parmi les pauvres ». Mais le défi passionne cette juriste de formation : répondre aux urgences des délégations confrontées à des familles à la rue, se rendre sur le terrain lors d’activités péri-scolaires ou dialoguer avec des mairies sur des projets de logements, étudier l’embauche d’un Rom roumain au Secours catholique, former à l’accès aux droits, faire connaître cette culture en partenariat avec des anthropologues et des ethnologues, se rendre dans tel ministère avec le collectif Romeurope… Et, surtout, « au-delà des préjugés et des fantasmes, montrer que ce peuple a sa place en France et une richesse à apporter en terme de solidarité, d’attachement à la famille et d’adaptabilité ».

Créer des passerelles et des ponts

S’il est issu de la communauté manouche, le Père Christophe Sauvé a pour mission comme tout prêtre « d’annoncer l’amour de Dieu pour tous sans distinction, en communion avec son évêque». Au séminaire, il avait déjà habité avec des Roms au nom de cette parole du Christ : « Je viens demeurer chez toi » (Luc 19,5). A Nantes, sur une aire d’accueil, il a vécu deux mois en caravane à leur écoute, partageant même leur expulsion. Membre de l’équipe pastorale de la paroisse Bienheureux Marcel Callo d’une immense cité HLM, il visite les familles relogées, célèbre deuils et baptêmes, téléphone à ceux qui sont disséminés dans la diaspora et se rend en Roumanie pour « garder pérenne ce lien de fraternité ». Aumônier diocésain et provincial des Gens du voyage, il tente de « créer des passerelles et des ponts ainsi qu’un climat de paix entre les ethnies tsiganes ». La présence de Roms à la Fête des Peuples est, dit-il « une invitation, au-delà de la prière, à vivre ensemble. Sans angélisme et sans communautarisme ».

Accueillir au presbytère

Curé de Vaulx-en-Velin depuis sept ans, le Père Régis Charre témoigne vivre, à travers sa relation avec les Roms, « une expérience humaine et spirituelle comme celle des moines de Tibhirine ». Avec une paroissienne qui s’était dédiée à quelques familles, il a appris à les connaître « frères et sœurs en humanité ». Preuve que « le blé laissé en terre produit beaucoup de fruit », cette femme aujourd’hui décédée, il s’est converti à leur accueil. Il héberge au presbytère une quinzaine de personnes, mobilise un « efficace petit réseau » pour trouver matelas et gazinières, aider à la scolarisation des primaires et « transformer le cercle vicieux ni travail-ni logement-ni papiers en cercle vertueux, travail-logement-papiers ». Il y a, explique-t-il, « un prix à payer » : l’angoisse quant à leur sort, du temps, un peu d’argent, des marques d’incompréhension et la police « sur le dos ».

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