Mgr Santier : « Dialoguer avec l’autre oblige à approfondir les raisons pour lesquelles on croit »

Interview de Mgr Michel Santier, évêque de Créteil et président du Conseil pour les relations interreligieuses et les nouveaux courants religieux. Propos recueillis par Stéphane Laforge.

La jeunesse est une période où se bâtit l’identité et s’affermit la foi. Le dialogue interreligieux joue-t-il un rôle dans cette construction ?

Absolument. J’entends parfois des voix s’interroger sur l’intérêt de faire rencontrer aux jeunes catholiques des jeunes juifs ou musulmans alors que leur personnalité n’est pas encore affirmée ou que leur culture chrétienne n’est pas assez solide. La rencontre avec l’autre permet de se bâtir une vraie personnalité. Les jeunes étudiants n’échappent pas à ce qui se passe dans la société. Aller vers celui qui est différent fait peur et provoque un repli sur soi. Parvenir à dépasser ce réflexe naturel, c’est s’enrichir sur le plan humain, spirituel, et de la foi. Le dialogue avec l’autre m’oblige à approfondir les raisons pour lesquelles je suis croyant, catholique, musulman, juif… Pour que la rencontre soit véritable, il est nécessaire d’affirmer ce que l’on est. Le dialogue interreligieux implique d’être conduit par l’autre à dire ce qui m’anime profondément.
 

Le dialogue interreligieux est-il un élément indissociable de la foi chrétienne ?

Le Christ a offert sa vie pour le Salut de tous les hommes. Aucun homme n’est donc exclu dans le dessein de Dieu. Le dialogue interreligieux d’une certaine façon est inhérent à cette tension dans l’Église, par nature universelle. Celle-ci est amenée à faire en sorte que le message de l’Évangile puisse être accueilli dans toutes cultures et dans toutes langues.
Par ailleurs, permettre aux jeunes étudiants de percevoir ce que vivent des jeunes croyants juifs, musulmans, bouddhistes, c’est s’inscrire dans l’esprit de l’enseignement du Concile Vatican II. Il invite à porter sur l’autre croyant un regard d’estime, or ce regard, respectueux de la liberté de conscience, est celui que Dieu porte sur chaque être humain. Pour que la rencontre se réalise, je dois écouter, entendre ce que l’autre me dit, ne pas me placer dans une position de supériorité comme si je cherchais à l’enseigner. Si j’essaie de convertir l’autre, je ne suis plus dans une vérité de dialogue.
 

Sur le même thème

à consulter sur le sujet

DSE doctrine sociale