Pascal, le coeur et la raison
Fiche de l’Observatoire Foi et Culture (OFC 2017, n° 6) sur l’exposition « Pascal, le coeur et la raison » à la Bibliothèque nationale de France, à Paris.
A l’occasion d’une exposition organisée à la BNF, site François Mitterand, Galerie 1 (8 novembre 2016 – 29 janvier 2017) : « Pascal, le coeur et la raison », un catalogue remarquable a été édité, qui est peut-être le meilleur et le plus complet des ouvrages de synthèse consacrés à Pascal à ce jour.
Ce livre permet à l’amateur, comme au spécialiste, de se donner une représentation sans faille ni simplification d’une oeuvre que l’on doit dire mémorable, au sens propre de ce mot.
Grâce à la collaboration de spécialistes qui ne sont pas cuistres, le catalogue est à la fois un superbe livre d’ « images » et une somme pascalienne claire, profonde, qui n’évite aucun aspect du génie pascalien. Je donnerai en exemple de cette profondeur qui reste claire, sans simplification, les dernières pages (197 à 205) dues à Philippe Sellier.
Le livre sait bien lier la pensée de Pascal aux oeuvres majeures de la philosophie contemporaine par le sentiment de la contingence, de la finitude, de la solitude de l’homme, cet homme qui, dit Pascal, « passe infiniment l’homme ». « Je trouve bon, dit le penseur voyant, qu’on n’approfondisse pas l’opinion de Copernic, mais ceci : il importe à toute vie de savoir si l’âme est mortelle ou immortelle ». Lire avec attention et ferveur ce catalogue qui donne le moyen de parcourir tant la création scientifique de Pascal – celle qui marque la pensée du vide ou celle qui ouvre au calcul intégral des mathématiques moderne, aux dires de Leibniz -, que la création poétique qui se manifeste dans les premiers fragments, inoubliables : « rien ne peut fixer le fini entre les deux infinis qui l’enferment et le fuient ». Il est rare de pouvoir rassembler en un livre unique une biographie, un chemin de création scientifique, une oeuvre polémique qui n’oublie pas la grandeur, une nouvelle philosophie et les intuitions d’un poète.
Il serait regrettable de priver une bibliothèque d’un tel livre où Pascal nous rappelle que « tout ce qui est incompréhensible ne laisse pas d’être ».
Pascal, que les romantiques se sont si souvent représenté comme un solitaire, un Hamlet du catholicisme, fut en réalité un chrétien extrêmement actif, inventant la machine à calculer aussi bien que les transports urbains en commun, intervenant avec force dans les controverses de son temps, consacrant l’essentiel de ses dernières années à une apologie de la vision catholique du monde.
Pierre Cahné