« Revenir au Seigneur, c’est reconnaître que notre fragilité n’est pas désespérante » par Mgr Hamot

Père Jean Hamot

« Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ». L’Eglise nous propose cet appel du prophète Joël, pour nous mettre sur la route de Pâques et nous permettre de commencer le saint temps du Carême. Quel que soit notre âge, notre condition, notre emploi, ce passage est un appel à se convertir.

Plus que jamais dans le monde où nous vivons, monde de violences, monde où l’on est obnubilé par le « gagner plus », le « consommer plus », où l’on impose une manière de penser l’homme, de percevoir la femme comme objet de plaisir et de sollicitations de tous ordres, dans ce monde où l’on a perdu le sens et la valeur de la Vie, il est « temps de prendre le temps » de se mettre en face de Dieu, en face de soi-même.
« C’est donc le temps favorable », propice à l’intensification de la prière, de la pénitence, en ouvrant nos cœurs docilement à ce que Dieu attend de nous. Revenir au Seigneur, c’est accepter de suivre cet itinéraire spirituel qui nous prépare à revivre le grand mystère de la mort et de la résurrection du Christ, à travers une écoute plus effective de la Parole de Dieu, c’est accepter une pratique plus généreuse du partage, afin de mieux aider nos frères dans le besoin.

Nous entrons en carême, par la célébration des Cendres : « poussière, nous sommes ».Ce geste qui se réfère à la cendre de l’Ancien Testament manifeste notre désir de pénitence, de repentir. Cette marque sur notre front ou dans nos mains, nous invite à l’humilité devant notre condition mortelle, à prendre conscience de nos fragilités, à nous tourner avec confiance vers le Seigneur. N’est-ce pas l’attitude de l’enfant prodigue. ? Ce fils révolté qui veut vivre sa vie, qui refuse d’être soumis, qui croit qu’il sera plus libre s’il est totalement indépendant. C’est le refus du père. Mais survient un événement qui le fait réagir : c’est la famine. Après avoir gaspillé, il se trouve dans la misère, plus misérable que les bêtes qu’il garde. Devant le gâchis de sa vie, il s’arrête, il descend en lui-même. Il décide donc de retourner chez son père en reconnaissant son mal, sa faute et en reconnaissant aussi qu’il le mérite.

Revenir au Seigneur, c’est prendre la même route que l’enfant prodigue. C’est faire un temps d’arrêt, se remettre en cause. C’est prendre un temps de réflexion et de prière. C’est prendre le temps de rencontrer Dieu et les autres, c’est prendre le temps de témoigner.

En cette année 2011, revenir au Seigneur consistera pour nous à nous inquiéter de la recrudescence de la violence : bagarres dans les écoles, dans la rue, dans les familles. Les médias nous abreuvent de tous ces faits qui nous inquiètent, nous maintiennent dans la peur, la méfiance, l’angoisse, qui fragilisent la personne, le couple, la famille, la société. Nous disons que nous n’y pouvons rien et nous nous voilons la face. Mais prenons le temps de nous interroger : quelle est notre part de responsabilité ?

Revenir au Seigneur, c’est aussi se demander ce qui a pu nous éloigner de lui : les relations en famille, les conflits d’intérêt, les questions d’héritage, la débrouillardise. Tous ces chemins utilisés pour que se réalisent « nos affaires », quitte à piétiner les autres, au détriment du bien commun. N’y pouvons-nous vraiment rien ? N’avons-nous pas notre part de responsabilité ?

Revenir au Seigneur en cette année 2011, c’est reconnaître que notre Dieu, ce Père à la fois miséricordieux et exigeant nous invite à construire son Royaume. Nous sommes son Eglise envoyée pour annoncer la Bonne Nouvelle du Ressuscité. Aussi, prenons le temps de vivre à l’écoute du Christ et de nous laisser saisir par son Esprit. Prenons le temps de nous regarder tels que nous sommes, de laisser agir l’Esprit en nous. Prenons le temps de regarder le monde tel qu’il est, d’accueillir le regard de ceux que nous côtoyons dans notre travail, dans notre quartier. Prenons le temps de nous recueillir, de méditer la parole de Dieu, de prier. Alors, nous pourrons être capables de faire l’aumône, de jeûner.

La célébration de Pâques va clôturer notre temps de carême. Revenir au Seigneur, c’est reconnaître que notre fragilité n’est pas désespérante. Elle est entre les mains de Celui qui a relevé d’entre les morts son Fils bien-aimé, pour en faire le premier-né d’une multitude. Ce temps de carême nous est offert pour réveiller en nous l’amour de Dieu et l’amour de nos frères, et nous comprenons mieux l’importance de ce qui nous est proposé : la prière, le jeûne et l’aumône.

Prenons résolument le chemin qui nous conduit à PAQUES. Dieu notre Père nous appelle à vivre, il connaît ce qui nous retient loin de Lui. Que « l’entraînement » du CAREME nous ouvre des espaces neufs, des chemins de liberté, que nos partages, nos prières et notre jeûne renouvellent notre vie de baptisé et nous conduise vers la lumière de PAQUES dans une vie renouvelée.

 

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