Bernadette et Marie

Lourdes est un lieu de prière et de conversion. C’est un lieu où les malades reçoivent une grâce et où la maladie cesse de faire peur tant aux bien portants qu’aux malades. Les exclus de toute sorte, les jeunes, les chrétiens du seuil comme les plus engagés s’y trouvent à leur aise.
La personnalité de Bernadette doit y être pour quelque chose : elle était asthmatique, exerçait le métier de chiffonnière et travaillait dans un bar appartenant à une de ses tantes parce que son père avait perdu son travail. «Les apparitions de Marie furent sa première expérience de lumière dans une vie de frustration», remarque le P. Horacio Brito, missionnaire de l’Immaculée Conception et supérieur des Pères de Garaison, qui fut recteur adjoint à Lourdes pendant cinq ans.

Très tôt, Lourdes a accueilli des pèlerins qui ne pouvaient payer leur séjour dans une pension de famille et, en 1955, Mgr Jean Rodhain, fondateur du Secours catholique, lançait à leur intention la construction de la Cité Saint-Pierre. Une foule bigarrée, venue de tous pays, se presse librement à Lourdes. Les jeunes aussi peuvent se sentir chez eux. Au départ, Lourdes n’est-elle pas la rencontre de deux jeunes filles : Marie et Bernadette ? La première s’adresse à la seconde en la vouvoyant. «Elle fut la première à me dire vous !», déclara Bernadette. Les jeunes peuvent être sensibles à ce respect de Marie. Ils trouvent à Lourdes une vie de groupe où ils sont respectés et ils se sentent exister à la faveur des divers services qui leur sont proposés… et le service ouvre les cœurs et les rend disponibles.

Tous ces ingrédients réunis, et bien d’autres encore, font de Lourdes une microsociété étonnante où l’Esprit est mystérieusement à l’œuvre.

 Patrick de Sagazan, extrait de « Catholique en France », n°35

 

Un personnage éminemment sympathique

Sainte Bernadette Soubirous [1844-1879]. De santé fragile, mais entourée de l’amour des siens et d’une foi solide, cette adolescente de quatorze ans rencontra la Vierge à dix-huit reprises à la grotte de Massabielle.

Le personnage de Bernadette est éminemment sympathique. En parlant de Bernadette, le mot « personnage » vient immédiatement sous la plume, tant son histoire semble relever du roman ou du théâtre.

Bernadette n’est pas un être fictif. Sa vie n’a pas été enjolivée par des siècles de dévotion. Bernadette nous est très bien connue, car elle a toujours vécu sous le regard de nombreux témoins et que les adversaires des Apparitions auraient été trop heureux de trouver quelque faille dans la biographie de la voyante.

Qu’est-ce qui rend Bernadette sympathique ? Sa liberté, son courage, sa dignité.

Elle était libre, même par rapport au message dont elle était chargée : « S’ils ne veulent pas le croire, qu’ils le laissent ! »

Du courage, il lui en fallut beaucoup pour résister aux pièges et aux menaces qui essayèrent de l’amener à se contredire ou se dédire. Il lui en fallut aussi pour aborder le curé Peyramale qui n’était pas un mauvais homme, mais qui n’avait aucun motif de faire confiance à cette fillette qui n’allait même pas au catéchisme.

Digne, elle l’a été en refusant toute compromission avec l’argent et tout vedettariat.

Les traits que je viens de signaler ne sont pas ceux qui d’habitude sont mis en avant. Le portrait de Bernadette insiste plutôt sur sa misère, sa maladie, son absence d’instruction.

Bernadette n’est pas née dans une famille pauvre. Sa petite enfance fut heureuse. Mais il est vrai qu’à l’époque des Apparitions, la famille était ruinée, et donc déshonorée aux yeux de certains. Et nous, d’ailleurs, qu’aurions-nous pensé des Soubirous ?

La santé de Bernadette était mauvaise, depuis l’épidémie de choléra qui avait fait des ravages à Lourdes. Mais elle n’était pas femme à se plaindre : le 11 février, elle insiste pour accompagner, malgré le froid, les deux fillettes partant chercher du bois.

Et si Bernadette, à 14 ans, ne savait ni lire ni écrire, elle était loin d’être sotte : le médecin qui soignait la communauté de Nevers la prendra comme infirmière et faisait son éloge professionnel.

Bernadette souffrait donc de certains handicaps, mais il ne faut pas noircir le tableau à l’excès. Elle possédait encore d’autres atouts : l’amour de son père, la solidité du clan familial qui n’a jamais mis en doute la bonne foi de la voyante, une vie chrétienne simple, mais solide.

La vie de Bernadette ne s’est pas arrêtée en 1858. Elle vivra encore vingt-et-un ans, dont huit à Lourdes et treize à Nevers. En 2008, nous la suivrons durant ces vingt-et-un ans qui firent d’elle une sainte. Nous nous apercevrons qu’elle ne vécut pas dans la nostalgie des Apparitions, mais dans la suite du Christ, rencontré dans l’Eucharistie et dans les malades.

Par Mgr Jacques Perrier
Évêque de Tarbes et Lourdes

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« Elle ne vécut pas dans la nostalgie des Apparitions, mais dans la suite du Christ »

* Sainte Bernadette Soubirous est née le 7 janvier 1844 au Moulin de Boly, à Lourdes.
* 1858 Du 11 février au 16 juillet, la Vierge lui apparaît dix-huit fois à la grotte de Massabielle.
* 1866 Quitte Lourdes pour Nevers où elle prend l’habit des Sœurs de la charité de Nevers. Elle reçoit le nom de sœur Marie-Bernard.
* 1867 Profession religieuse dans la congrégation des Sœurs de la charité de Nevers le 30 octobre.
* 1879 Meurt le 16 avril (mercredi de Pâques).
* 1925 Béatifiée par Pie XI le 14 juin.
* 1933 Canonisée par Pie XI le 8 décembre, à Saint-Pierre de Rome.

* Article paru dans  « Catholiques en France » n°35