» E-Miséricorde – Réseaux, solidarité et terrorisme – une approche « cash » de la miséricorde « par Frère Salobir
Témoignage du Frère Eric SALOBIR, o.p., pour l’opération « Toile de Miséricorde », lancée par l’Eglise catholique en France, à l’occasion de la 50ème Journée mondiale de la Communication, dimanche 8 mai 2016.
Frère Dominicain, Eric Salobir est membre du Conseil pontifical pour la communication depuis 2012. Il est également responsable communication-médias de son ordre.
En cette année jubilaire, on évoque la Miséricorde à tout propos. En tant que professionnel du numérique, je suis donc aussi sensé la voir se déployer sur les réseaux sociaux. La tentation est alors grande d’écrire sur la façon de rendre nos profils Facebook ou Twitter encore plus douillets. Pourtant, les attentats terroristes maintenant réguliers entachent ce monde de Bisounours numériques : les réseaux peuvent être un lieu de propagande et de radicalisation. Après les récents attentats de Bruxelles, des comptes djihadistes y ont même diffusé de fausses informations, signalant des menaces imaginaires pour ajouter à la panique. Il faut se rendre à l’évidence : les réseaux, comme la rue, sont devenus le lieu d’un combat.
Certes, ils sont également devenus les vecteurs d’une nouvelle solidarité. Facebook, avec sa fonction « Safety check » a permis à beaucoup d’internautes de signaler à leurs proches qu’ils étaient en sécurité. En outre, une immense vague de compassion a paré les réseaux aux couleurs des pays des victimes. « Pray for Paris ! » Pourtant, à mesure que les attentats se succèdent, même ces bons sentiments soulèvent des questions, et certains commencent à fustiger les concours de dessins ou de déclarations publiques de condoléances. La « bienveillance pour tous » finit par user la Miséricorde.
Le fait est que lancer à la cantonade un petit mot gentil ne suffit pas : la Miséricorde implique littéralement d’ouvrir son cœur à celui qui est dans la peine ou la misère. Un peu comme lorsque, via l’opération #PorteOuverte, des internautes ont donné refuge à des inconnus désemparés par les attaques. Les réseaux sont numériques, mais nos relations n’y sont pas virtuelles. Chaque contact y est une possibilité de faire œuvre de Miséricorde.
Certes, cela peut s’entendre face aux victimes, mais que faire face aux autres, à qui peut incomber une part de faute ? Sans naïveté, sans faiblesse ni complaisance pour aucune forme de violence, je ne peux cependant m’empêcher de penser à la prière de saint Dominique : « Mon Dieu, ma Miséricorde, que vont devenir les pécheurs ? »
Cette question, nous pouvons aussi la faire nôtre, en cette année de la Miséricorde. Non pas pour laisser se répandre une barbarie que notre société doit éradiquer, mais pour ne pas que cette barbarie contamine nos cœurs. La ténèbre ne peut chasser la ténèbre. Seule la lumière le peut. Si les réseaux sont le lieu d’un combat, que celui-ci soit aussi spirituel et que triomphe la vraie lumière d’un Dieu miséricordieux.