Semaine sociale de France, école de nouvelles solidarités

Semaines sociales

Face, dans notre société, à un certain « consentement à l’inégalité »*, les 3 000 participants réunis du 20 au 22 novembre pour la 84e Semaine Sociale de France au parc des expositions de Villepinte (93) invitent à un sursaut citoyen et collectif.
 
Accueillant ses hôtes dans ce diocèse-monde de Saint-Denis-en-France qui « propulse dans la solidarité internationale » et concentre difficultés et innovations sociales, Mgr Pascal Delannoy déclarait en ouverture des travaux « nous ne pouvons pas rêver la solidarité, nous ne pouvons que la vivre ».

Pendant trois jours, les 3 000 « Semainiers » ont non seulement imaginé mais expérimenté ces nouvelles solidarités. Ils ont aussi prié pour qu’elles adviennent. « Je crois que nous, chrétiens, nous avons à retrouver le service du frère qui est la fraternité, à ne pas renvoyer aux spécialistes mais à nous coltiner tous ensemble autour de cette question » a annoncé l’économiste Robert Rochefort. Message reçu cinq sur cinq. Dans la grande tradition de la doctrine sociale de l’Eglise – l’encyclique Caritas in Veritate a servi de fil rouge aux intervenants – et avec l’apport qui reste révolutionnaire du message chrétien, la Semaine sociale a apporté sa quote-part à la réflexion sur les grands défis de ce temps.

La contribution du théologien jésuite Etienne Grieu fut à cet égard éclairante. Rappelant la « surprenante créativité des chrétiens tout au long de l’Histoire », ce familier du Sappel, une communauté chrétienne de personnes très pauvres, a expliqué combien « la rencontre avec les plus fragiles est aussi un lieu spirituel, pas un simple lieu d’application des valeurs ». Pierre Calame, directeur de la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme, a rappelé lui aussi que ce qui justifie la solidarité, « c’est ce dont l’autre manque » tandis qu’Emmanuel Faber, directeur général délégué de Danone a évoqué « un manque qui ne sera jamais comblé par la surabondance qui nous est proposée ».

Sur ce thème, Etienne Grieu a déclaré que riches et pauvres sont « endettés […] bénéficiaires d’un don qu’on ne peut rembourser », celui de la vie, l’engagement de Dieu envers l’homme ayant été irrévocable et gratuit. Face au système d’échanges calculés qui est l’ordinaire des relations humaines, « chaque fois que nous donnons le primat au lien sur la rétribution, nous sommes donc sur les traces du Christ ».

L’expertise des plus pauvres
Grande première, des hommes et des femmes ont incarné physiquement cette nouvelle page de la solidarité : celle du partenariat et plus de l’assistance. Près de 200 personnes vulnérables, proches d’ATD Quart Monde, Secours catholique, des Conférences St Vincent de Paul et d’Habitat et Humanisme, ont participé à part entière aux côtés des chercheurs, syndicalistes, politiques, chefs d’entreprise. Autant à travers des scènes humoristico-réalistes de théâtre-forum (via la compagnie NAJE-Nous n’Abandonnerons Jamais l’Espoir) qu’en tant que personnes-ressources lors des ateliers du samedi après-midi.

« Il ne faut pas seulement recueillir leur avis mais leur avis doit compter autant que celui avec qui ils dialoguent », a commenté Paul Bouchet, président d’honneur d’ATD Quart Monde. « Si on parle de solidarité sans changer la société, alors là on a tout faux. C’est comme une cerise sur un gâteau brûlé », a dit joliment, Marie-France Zimmer, membre de cette association, l’une de ces voix des exclus.

Lorsque l’économie devient lieu d’alliance

Tissant à son enthousiasmante manière des liens entre Bible et économie, Elena Lasida, qui dirige le master « Economie solidaire et logique du marché » à l’Institut catholique de Paris, a démontré comment l’économie solidaire (commerce équitable, entreprises d’insertion…), sujet phare de cette rencontre est « porteuse d’alliance et de promesse ainsi que d’émergence d’une société nouvelle ».

*Affirmation de l’historien Pierre Rosanvallon, lors de sa conférence

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