Regard sur la vie religieuse en Europe

L’Union des conférences européennes des Supérieur(es) Majeures (UCESM) tient son assemblée générale jusqu’au 25 mars 2012 à Lourdes autour du thème « Religieux et religieuses en Europe : la vie comme vocation ». L’occasion de faire, avec Sœur Lutgardis Craeynest, fma, présidente de l’UCESM, un état des lieux de la vie religieuse en Europe.
 

Qu’est-ce qui caractérise la vie religieuse en Europe ?

Lutgardis_Craeynest

La situation est complexe. C’est un fait que le nombre des religieux et religieuses diminue. En 2008, l’UCESM – qui ne représente pas tous les religieux/ses présents en Europe – rassemblait 400 000 personnes. À présent, je pense qu’il se situe autour de 300 000. Mais il y a des formes nouvelles de vie consacrée qui accueillent beaucoup de jeunes dont nous ne connaissons pas le nombre. La situation est aussi complexe en raison de la diversité entre l’Europe de l’Est et celle de l’Ouest. Pour l’heure, la vie religieuse en Europe réfléchit sur son identité profonde et le sens de son existence dans nos sociétés européennes très diversifiées suivant le pays. C’est un moment difficile, mais important et intéressant.
 

Quelles grandes évolutions constatez-vous ?

Un mélange d’insécurité et de courage. Après 1989 et la libération de l’Europe de l’Est, on a découvert une richesse de vocations. Des maisons de formation ont été construites à la hâte pour répondre aux besoins, mais on assiste maintenant à une diminution de vocations. Dans les pays de l’Ouest, les communautés nouvelles attirent beaucoup de jeunes. Parmi les congrégations de fondation plus ancienne, beaucoup se préparent à une disparition de leur Institut et travaillent à la transmission de leurs œuvres à des laïcs, les préparant à continuer l’œuvre dans le même esprit. D’autres congrégations répondent à de nouvelles pauvretés dans les domaines du sanitaire et du social. Elles créent des lieux de rencontres et de prière, elles offrent, aux jeunes qui le désirent, des possibilités pour s’engager dans leur propre pays ou dans le tiers-monde.
 

Quelles sont les richesses de la vie religieuse en Europe ?

La gratuité et le don de soi-même attirent les jeunes les plus généreux. Les réseaux qui se créent entre les communautés et entre les congrégations font naître un climat d’accueil réciproque entre différentes cultures. La sagesse formée au long des siècles fait signe. C’est une richesse que l’Europe ne doit pas laisser perdre. Il suffit de penser à la personnalité spirituelle des fondateurs et des fondatrices : tout ne naît pas du seul temps présent. Pensons à Benoît, François, Dominique, Don Bosco, Angèle de Mérici, Ignace… En vivant le pluralisme, en partageant des engagements avec des personnes d’autres pays et cultures, les religieux/ses acquièrent une ouverture à l’échelle du monde. Nous pouvons remarquer que l’Europe a donné des religieux/ses qui ont été les moteurs d’une réflexion et d’une action à dimension internationale : Sr Emmanuelle, l’Abbé Pierre, Mère Teresa, le Père Damien de Veuster. De plus, la façon de gérer une congrégation ouvre une voie pour une démocratie saine, une démocratie où se vit l’échange des idées.
 

Sur quoi les engagements des religieux en Europe interpellent-ils la société contemporaine européenne ?

Même si l’Europe n’a pas souhaité parler de « ses racines chrétiennes », les religieux/ses prennent la parole – sont une Parole -, et ils appellent la Communauté Européenne à s’engager. Pour la paix : les religieux/ses vivent ensemble, sans se choisir, ils s’engagent ensemble dans des projets qui dépassent les frontières. Pour la solidarité : beaucoup de congrégations ont un siège à l’ONU pour y porter la voix de ceux qui n’ont pas « voix au chapitre ». Cela veut dire qu’ils sont là où se font les lois mais qu’ils sont aussi présents là où il faut s’engager concrètement pour les personnes qui sont dans le besoin. Pour la dignité humaine : dans la ligne d’un humanisme personnaliste et communautaire, les religieux/ses considèrent que chaque personne est « Fils/Fille de Dieu », appelée à grandir dans une plénitude d’humanité. De là l’engagement dans des œuvres éducatives, des œuvres caritatives et le respect pour le début et la fin de la vie de toute personne.
 

Quel message fort souhaitez-vous partager avec les participants de la prochaine assemblée générale de l’UCESM à Lourdes ?

Être des personnes qui ont le courage de s’ouvrir au Mystère de la vie, la vie qui se révèle dans la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Des personnes ouvertes au Père et poussées par l’Esprit vers le monde, afin que leur vie soit contagieuse et permette à d’autres de découvrir qu’ils sont appelés. C’est-à-dire aimés personnellement par un amour concret et appelés à aimer d’un amour concret, appelés à l’Amour par Dieu qui est Amour.
 

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XVe assemblée générale de l’UCESM, du 19 au 25 mars 2012 à Lourdes

L’Assemblée générale de l’UCSEM réunit les délégations des conférences nationales de différents pays d’Europe (27 pays en 2012) et des représentants d’autres instances ecclésiales européennes. Plus d’une centaine de participants participent à cette XVe assemblée. Ce rendez-vous en France, à Lourdes, est une première ! Après les thèmes de la vie spirituelle (2006, Portugal), la communauté (2008, Belgique), la mission (2010, Pologne), l’assemblée générale de l’UCESM met, en 2012, l’accent sur « la vocation », en s’appuyant particulièrement sur l’itinéraire de sainte Bernadette. Même s’ils connaissent des difficultés, les religieux/ses veulent redire que leur vocation continue, avec toute la richesse de la vie spirituelle, de la vie communautaire et de la mission. « La vie comme vocation » signifie aussi que la rencontre de l’autre peut être une parole, un appel qui met en route et qui fait vivre.
Par ailleurs, toutes les conférences nationales membres de l’UCESM seront intéressées de pouvoir percevoir le contexte dans lequel la Conférence des religieux et religieuses de France (CORREF) est engagée.

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