« Aider l’Eglise à adopter une position juste au sein de la société », par Mgr Brunin

Dans l’ambiance de la célébration du cinquantième anniversaire du Concile Vatican II, comment ne pas repenser aux paroles prononcées par le pape Jean XXIII dans son discours d’ouverture le 11 octobre 1962 ? « Il faut que, répondant à la vive attente de tous ceux qui aiment la religion chrétienne, catholique et apostolique, [ la ] doctrine soit plus largement et plus profondément connue, et que les esprits en soient plus pleinement imprégnés et formés ; il faut que cette doctrine certaine et immuable, que l’on doit suivre fidèlement, soit explorée et exposée de la lumière que demande notre époque ».

L’effort de contextualisation de la pensée de l’Eglise dans les divers domaines de sa doctrine, concerne aussi le domaine de la doctrine sociale. Il ne peut s’agir de répéter des formules qui se sont élaborées dans des contextes précis, il faut pouvoir nous mettre au travail dans la recherche de la vérité à la lumière de la Révélation. Pour cela, nous devons réassumer de façon responsable la tradition de l’enseignement social de l’Eglise dans une confrontation avec les analyses des phénomènes sociaux et des évolutions du monde.

Benoît XVI encourage largement le travail de la raison dans la recherche de la vérité. Il nous invite au dialogue et au travail dans un climat de respect et de liberté. Cela vaut, bien évidemment, pour la manière dont l’Eglise prétend éclairer le sens des questions sociales à partir de l’Evangile et de la tradition sociale.

Le Conseil Famille et Société entre dans cette perspective d’un service de la pensée sociale de l’Eglise en France. Il veut aider l’Eglise à adopter une position juste au sein de la société. Il s’agit d’éviter un double écueil :

* le repli sur soi confessionnel dans un désintérêt pour les questions de nos contemporains ou, au mieux, la réduction de la réflexion sociale à la simple relecture religieuse des situations et des événements.

* la volonté de vouloir imposer à la société, dans un rapport de force et sans rechercher à dialoguer, l’approche ecclésiale des questions.

Evitant ces deux écueils, l’objectif du Conseil Famille et Société est bien d’aider l’Eglise en France à apporter sa pleine contribution au cœur des débats sur les questions qui se posent dans une société marquée par une crise économique, financière et sociale et morale, qu’il lui faut gérer dans un environnement mondialisé où elle fait l’expérience de l’interdépendance. Dans son encyclique Sollicitudo rei socialis n° 41, Jean-Paul II déclarait : « L’Église ne propose pas des systèmes ou des programmes économiques et politiques, elle ne veut pas énoncer une ‘idéologie’ de plus. Pourtant, elle a une ‘parole à dire’ sur la nature, les conditions, les exigences et les fins du développement authentique et aussi sur les obstacles qui l’entravent ».

Par son engagement public dans le débat, l’Eglise veut ainsi contribuer à servir et à promouvoir le projet de Dieu sur l’humanité. Elle est appelée à ouvrir des perspectives vers une « mondialisation de la solidarité » (Jean-Paul II), une « écologie humaine » (Benoît XVI) et vers l’unité de la famille humaine.

Voilà pourquoi, au titre de ma responsabilité au Conseil Famille et Société de la Conférence des évêques, je salue l’heureuse initiative du CERAS pour la création de ce site de la Doctrine Sociale qui met à disposition de tous, de façon agréable et documentée, le trésor de l’enseignement social de l’Eglise.

Avec le Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise promulgué en avril 2004 par le Conseil Pontifical Justice et Paix, nous avons avec le site de la Doctrine Sociale du CERAS, un nouvel outil qui offre un espace d’appropriation des grands textes où s’est déployée la pensée sociale de l’Eglise. L’accès peut être soit thématique, soit chronologique pour satisfaire à l’approche contextuelle des documents. L’une et l’autre de ces approches rendent accessibles pour le plus grand nombre, au-delà des seuls cercles catholiques, les éléments essentiels de la doctrine sociale de l’Eglise catholique.

Je souhaite aussi qu’il permette aux pasteurs et aux fidèles laïcs du Christ, soucieux d’une présence et d’une influence chrétiennes dans la société, de trouver les éléments à partir desquels ils pourront donner vigueur, actualité et pertinence à la pensée sociale de l’Eglise. Je ne peux manquer d’évoquer ici le document du Conseil Famille et Société, « Grandir dans la crise » où les évêques de France ré expriment les grandes lignes de l’enseignement social de l’Eglise dans le contexte particulier de la crise que nous traversons. « Ce qui est en cause, ce n’est pas seulement le fonctionnement du système bancaire, ni le niveau de rémunération des traders, dirigeants ou actionnaires, mais une façon de concevoir le vivre ensemble et de situer le rôle du travail, de l’argent, de la consommation et du partage des richesses » écrivent-ils pour aider au discernement de chacun.

Merci à tous ceux qui ont accepté de répondre à l’invitation du CERAS pour s’engager et apporter leur contribution à l’animation de ce site. Il est une aide précieuse pour aider les chrétiens et les Eglises locales à répondre à l’invitation à s’engager dans la nouvelle évangélisation. Celle-ci nécessite que la parole et la réflexion de l’Eglise croisent les paroles et les réflexions des hommes, dans une conversation et un dialogue respectueux. Elle vise aussi à l’inscription des dynamismes évangéliques dans les réseaux relationnels et institutionnels de notre société, pour y discerner, rejoindre et annoncer la présence des dynamismes du Règne de Dieu.

+ Jean-Luc BRUNIN
Evêque du Havre
Président du Conseil Famille et Société
 

Déclaration de Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre et Président du Conseil Famille et Société à l’occasion de la conférence de presse organisée pour  inaugurer le site Internet « Doctrine sociale de l’Eglise catholique » le 12 mars 2012

Sur le même thème

à consulter sur le sujet

DSE doctrine sociale
économie - textes et documents de référence