« Allez, sans peur, pour servir ! » par Mgr Souchu
C’est bien dans cet esprit missionnaire qu’il nous faut entrer dans le thème donné pour la journée mondiale de prière pour les vocations.
Il convient tout d’abord de nous interroger sur le rôle du témoin et sur ce qu’est la vérité (comme la fameuse question posée par Pilate devant Jésus au moment de sa passion : « Qu’est-ce que la vérité ? » (Jn 18, 38). Ensuite, nous étudierons l’expression « rendre témoignage à la vérité » qui se retrouve plusieurs fois dans l’Évangile. Ce détour par l’Écriture sainte nous permettra de mieux comprendre comment les vocations constituent un témoignage de la vérité, suivant le thème retenu cette année.
Le rôle du témoin
À Antioche, les premiers croyants qu’on a commencé à appeler « chrétiens » (Ac 11, 26), se sont contentés de se rendre témoignage les uns aux autres au sujet de Jésus. C’est l’expérience du retour des disciples d’Emmaüs, après avoir reconnu le Christ à la fraction du pain, qui s’entendent dire des onze apôtres : « C’est bien vrai, le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon » (Lc 24, 34).
Petit à petit vont s’élaborer des professions de foi, liées au rassemblement des chrétiens, les premières lettres apostoliques ; puis les Évangiles seront composés, dans un contexte de prédication vivante du Christ ressuscité par les apôtres de Jésus. Le témoignage des premiers chrétiens est bien celui d’une expérience affective, vivante, de leur rencontre avec le Christ, mort et ressuscité.
Les générations suivantes de croyants seront amenées à se constituer elles-mêmes témoins de la foi qui les habite, suivant l’exhortation de saint Pierre : « Soyez toujours prêts à justifier votre espérance devant ceux qui vous en demandent compte » (1 P 3, 15). Le présent et l’avenir de la foi dépendent donc essentiellement du témoignage des chrétiens, reçu de génération en génération. Ce qui veut bien dire que la génération d’aujourd’hui a une réelle responsabilité pour transmettre la foi que nous avons nous-même reçue. Le témoin rend témoignage ; suivant l’étymologie grecque, il est un véritable martyr, capable de donner sa vie pour la vérité.
Qu’est-ce que la vérité ?
Rendre témoignage à la vérité
L’Évangile nous montre que les Juifs, en refusant de croire à Jésus, s’enferment dans leurs propres contradictions. Dans ce chapitre 5 de saint Jean, l’expression « rendre témoignage » apparaît 7 fois entre le verset 31 et le verset 39. Mais les notables juifs continuent de refuser de croire. Ainsi, à la perfection du témoignage rendu par Dieu à Jésus, Jean oppose ce manque de foi des notables juifs.
Le témoignage de la vérité
Comme le rappelait Benoît XVI dans son encyclique Caritas in veritate : « La vérité est, en effet, logos qui crée un dialogos et donc une communication et une communion. En aidant les hommes à aller au-delà de leurs opinions et de leurs sensations subjectives, la vérité leur permet de dépasser les déterminismes culturels et historiques et de se rencontrer dans la reconnaissance de la substance et de la valeur des choses. » Et dans son exhortation apostolique sur les Églises du Moyen-Orient du 14 septembre 2012, il écrivait : « La vérité ne peut se développer que dans l’altérité… La vérité n’est possédée par personne, mais elle est toujours un don qui nous appelle à un cheminement d’assimilation toujours plus profonde à la vérité. »
Les vocations, témoignage de la vérité, s’inscrivent dans cette altérité c’est-à-dire cette rencontre avec l’autre qui doit conduire à l’Autre. C’est donner sa vie, en paroles et en actes, afin de servir non pas ce que nous pouvons penser de nous-mêmes, mais bien une vérité révélée, que nous recevons comme un don.
C’est pourquoi, pour conclure, je reviens sur le sous-titre donné à ce thème de la Journée mondiale de prière pour les vocations du dimanche 11 mai 2014, 4e dimanche de Pâques : « Allez, sans peur, pour servir. »
Pour témoigner, il faut aller. Les vocations constituent toujours un envoi, un déplacement afin d’annoncer un Autre que nous-même. C’est pourquoi le pape François disait aux jeunes à Rio : « N’ayez pas peur d’aller, et de porter le Christ en tout milieu, jusqu’aux périphéries existentielles, également à celui qui semble plus loin, plus indifférent. » Il faisait remarquer que le Christ n’a pas dit « va », mais « allez » ; c’est ensemble, dans la diversité de nos vocations, que nous sommes envoyés. Enfin, il indiquait qu’évangéliser, c’est servir. Ainsi, les vocations constituent un beau témoignage de la vérité lorsque nous acceptons de nous décentrer pour laisser la place à l’Esprit de Vérité qui ne cesse de guider son Église.
Mgr Nicolas Souchu
Évêque auxiliaire de Rennes