La vérité du Carême par Mgr Dupleix

Avec le mercredi des Cendres, les chrétiens sont entrés dans le temps du Carême et ne doutent pas de son importance, non seulement dans l’année liturgique et comme préparation aux fêtes pascales mais comme un temps fort de la vie spirituelle. Il y a pourtant toujours – malgré de nombreux efforts, choix ou décisions personnelles – quelques risques que les rythmes se maintiennent et que nous arrivions plutôt bousculés au seuil de la Semaine sainte.

Si nous reprenons l’Évangile lu à la célébration des Cendres, nous sommes conduits par les exhortations de Jésus aux disciples à vivre ce temps privilégié de la foi dans la vérité du cœur. Il s’agit d’abord – et ce souhait rassemble un peu tous les autres – de ne pas agir ou parler pour la galerie mais davantage par conviction intérieure et en gardant simplicité et humilité : « Évitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer… ». Les trois séries de conseils donnés par Jésus sont encadrées par deux images qui reviennent comme un leitmotiv : le spectacle et le secret. Se donner en spectacle ou agir dans le secret : « Ne faites pas comme ceux qui se donnent en spectacle… Ton Père voit ce que tu fais dans le secret… »

Il y a d’abord l’aumône – ce mot souvent mal compris… Peut-être parce que lorsque nous donnons pour venir en aide, la tentation est grande d’en tirer quelque profit moral ou social. Ce qui compte pourtant n’est pas de faire savoir que l’on donne, mais de donner avec le détachement nécessaire qui fait de cette action un geste vraiment libre.

Il y a ensuite la prière. Gardons-nous d’en faire une prière ostentatoire. Il ne s’agit pas de récuser la prière publique ou la visibilité inévitable des grandes liturgies festives, mais tout excès ou médiatisation excessive qui dénaturerait la dimension intérieure de la prière et de la célébration. La prière est, souvent dans le silence et la discrétion, présence aimante du Christ.

Il y a enfin le jeûne. Ce jeûne qui n’est ni une compétition avec notre corps ni une mortification stérile et ne doit pas être source d’une accablante tristesse mais plutôt une ouverture à la Parole structurante de Dieu et au souffle libérant de l’Esprit.

Tout cela, si nous savons le vivre loin des scènes de la comédie humaine, le Père qui nous voit et qui est au plus intime de nous-mêmes, nous le revaudra….