Messsage pascal de Mgr Marc Aillet, le 9 avril 2009

Mgr Marc Aillet

Des événements surmédiatisés ont ébranlé notre Eglise ces dernières semaines : l’incompréhension suscitée par le geste de réconciliation du Saint-Père en direction des responsables de la Fraternité Saint-Pie X, parasité par les propos inacceptables de Mgr Williamson ; les sentiments d’indignation soulevés par les informations trop partielles qui nous sont parvenues de Recife au Brésil ; le tollé, y compris d’une certaine partie de la classe politique française, provoqué par les propos tronqués de Benoît XVI sur la lutte contre le SIDA. Nombre de catholiques, abusés par le traitement incomplet et partial de l’information, ont été fragilisés dans leur confiance.

Cette « crise » de l’Eglise ne doit pas pour autant faire oublier l’ampleur de la crise financière qui s’est abattue sur notre monde et dont les conséquences économiques seront ressenties d’abord par les plus démunis. Dans un contexte incertain, malgré les signes positifs donnés par le G 20, il est prévisible que le nombre de demandeurs d’emploi augmente considérablement dans les mois à venir, en particulier dans les pays émergents dont la croissance de ces cinq dernières années constituait l’un des ressorts de l’économie mondiale. Il va sans dire que ma pensée se tourne en ces jours vers les familles touchées par la fermeture annoncée de certains sites industriels de notre département, à commencer par la Celanese, dans le bassin de Lacq : qu’elles trouvent auprès de nous soutien et réconfort, et auprès des politiques et autres décideurs de la société civile écoute attentive et solutions de reconversion.
 

Ces secousses nous révèlent la crise existentielle plus profonde qui affecte nos contemporains en quête de sens et de repères pour conduire leur vie. Aussi devons-nous nous interroger sérieusement sur l’origine de ce mal-être qui creuse le cœur de tant d’hommes et de femmes, induisant, en particulier chez les jeunes, des comportements de panique ou d’angoisse face à l’avenir : dépressions, suicides, violence, agressivité, relations affectives irresponsables, fuite dans l’excès de stupéfiants et d’alcool… Comme le rappelait le Pape Benoît XVI dans une lettre adressée à M. Gordon Brown, à la veille du G 20, en souhaitant une sortie de crise concertée et qui évite les solutions empreintes d’égoïsme national ou de protectionnisme : « Les crises financières se déclenchent quand – notamment à cause du déclin des comportements éthiques – les acteurs du secteur économique perdent confiance dans ses modes de fonctionnement et dans ses systèmes financiers […] Mais l’unique fondement vrai et solide est la confiance dans l’homme ». Le Saint-Père diagnostiquait encore dans une lettre adressée aux évêques de l’Eglise catholique le 10 mars dernier : « A ce moment de notre histoire, le vrai problème c’est que Dieu semble disparaître de l’horizon des hommes, et tandis que s’éteint la lumière provenant de Dieu, l’humanité manque d’orientation et les effets destructeurs se manifestent toujours plus en son sein ».

J’invite donc les fils et les filles de l’Eglise à surmonter leurs incompréhensions, leurs peurs et leurs craintes, même légitimes, et à prendre à bras le corps leurs responsabilités face aux crises qui affectent l’Eglise et la société, « sans se laisser emporter et détourner de cette mission par la violence des polémiques », comme l’affirmait le Cardinal Vingt-Trois, au nom de tous les évêques de France, dans son discours de clôture de l’assemblée plénière d’avril. Solidaires des joies et des espoirs, des détresses et des angoisses de leurs frères et sœurs en humanité, ils auront à cœur de donner au monde le vrai visage de l’Eglise : celui de la compassion et celui de la Vérité, car le monde a plus que jamais besoin d’amour et aussi de repères. C’est la leçon du voyage du Saint-Père en Afrique, boycotté par les medias occidentaux, mais où son message a été accueilli avec enthousiasme et a relancé l’Espérance dans un continent traversé par tant d’épreuves et de pauvretés, et où le potentiel humain est si riche et si prometteur que le Pape l’a appelé le « Continent de l’Espérance ». En communion avec le Saint-Père, à qui les évêques de France viennent de redire leur affection et leur soutien sans faille, nous sommes invités à ressaisir la priorité qui prédomine, « celle de rendre Dieu présent dans le monde et de donner aux hommes accès à Dieu […] ; à ce Dieu dont nous reconnaissons le visage dans l’amour poussé jusqu’au bout, en Jésus-Christ crucifié et ressuscité ».

En ces jours où l’Eglise célèbre la passion, la mort et la Résurrection de Jésus, les chrétiens sont invités à s’engager sur un chemin pascal. A la suite du Christ, rejeté et incompris des hommes de son temps, persécuté pour la justice, nous ne nous étonnons pas des incompréhensions du monde ; mais redoublant de solidarité avec les plus éprouvés, nous proclamons la seule Bonne Nouvelle qui est vraiment source d’Espérance pour le monde d’aujourd’hui : Celui qui était mort, Il est ressuscité et Il est Vivant pour les siècles des siècles (Cf. Ap 1, 18).

Joyeuses et saintes fêtes de Pâques.

Le 9 Avril 2009