La confirmation aujourd’hui | Documents épiscopat
Demander par lettre le sacrement de confirmation à son évêque est une démarche qui révèle la force d’une expérience vécue. Mgr Gérard Defois nous livre, dans ce document, un rapport synthétique d’enquête, après une lecture attentive et précise de quelque 1300 lettres de confirmands, mettant ainsi en lumière certaines urgences pastorales nécessaires pour entretenir, consolider et confirmer l’expérience spirituelle chrétienne.
Édito de Mgr Laurent Ulrich
Ce sont environ 40 000 lettres qui arrivent chaque année sur les bureaux des évêques en France! Cela fournit une photographie intéressante d’une partie de la société française, parmi les adolescents et les adultes, les plus jeunes en général : en effet, la plupart des demandeurs de la confirmation, chez les adultes, se situent entre vingt et trente ans.
La demande de la confirmation chez les adolescents et les adultes est déjà un phénomène intéressant. Il faut un certain courage pour prendre la décision d’être confirmé dans un monde fluctuent, et une société où la foi est tout simplement passée sous silence, marginalisée. Le nouvel archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit, vient de le dire dans les premières interviews qu’il a données aux médias : dans la société française actuelle, le tabou, c’est Dieu ! En lisant ces lettres, c’est ce courage que nous soutenons et cette force que nous attribuons à l’Esprit Saint que nous mettons en lumière.
Lire de près ces lettres, tenter une analyse de leur forme et de leur contenu devient dès lors fort instructif, plein d’enseignements pour nous, pasteurs et agents pastoraux. Les évêques seuls lisent ces lettres, mais il ne leur est pas forcément loisible d’en exploiter tout le contenu. C’est pourquoi il est apparu utile au Comité études et projets de la Conférence des évêques de France de confier à un évêque émérite, de surcroît connu comme sociologue, Mgr Gérard Defois, de lire un échantillon significatif de mille trois cents lettres, parvenues au cours de la même année 2013-2014 à cinq évêques de diocèses variés selon la taille et la sociologie : Chambéry, Clermont-Ferrand, Lille, Paris, Rouen.
Bien que beaucoup manquent de vocabulaire pour traduire cette expérience spirituelle, on peut sentir, à la lecture de ces lettres, une véritable envie de la partager.
Mgr Gérard Defois souligne des paradoxes révélateurs concernant les situations vécues par les croyants, dans leur vie personnelle et ecclésiale.
– Oui, l’Église est une institution qui peut paraître, comme d’autres, lointaine, mais elle est aussi perçue comme un lieu de proximité en ce qu’elle permet une relation intime avec Dieu. Ce contact direct avec la personne de l’évêque en est le signe.
– Oui, on perçoit une grande fragilité de la connaissance religieuse qui génère une «incroyance mentale», et risque de s’achever en «invocation de valeurs idéologiques» selon les expressions de Mgr Defois, mais la demande de la confirmation révèle la force d’une expérience vécue.
– Oui, cette expérience personnelle est forte, mais elle voisine avec l’incertitude et le sentiment toujours proche du doute.
– Oui, l’Esprit Saint n’est pas bien connu de ceux qui le demandent, mais il faut aussi leur permettre d’accéder à une relation personnelle avec Jésus Christ, celui que l’on connaît à travers l’Évangile.
– La plupart du temps, cette expérience est encore unique et elle demeure fragile. Il faut aider à la renouveler, à l’entretenir, à la confirmer pour tracer un chemin de vie chrétienne.
– Bien que beaucoup manquent de vocabulaire pour traduire cette expérience spirituelle, on peut sentir, à la lecture de ces lettres, une véritable envie de la partager.
– On ne peut certes pas opposer une vie intérieure qui prend conscience d’elle-même, et un désir d’engagement, de service des autres qui va interagir avec ce besoin d’intériorité.
– Devrait-on se contenter d’identifier ici un christianisme trop individuel? Ou bien percevoir aussi le sentiment apprécié par les candidats à la confirmation que d’autres, beaucoup d’autres sont sur la même route qu’eux, et le bonheur de ne pas être seul?
Dès lors, on aura mis en lumière certaines urgences de notre effort pastoral pour consolider les principaux piliers de l’expérience chrétienne : le service des autres, des plus fragiles ; le contact avec l’Écriture et l’ouverture à la lectio divina ; la recherche et la consolidation d’une vie intérieure et sacramentelle ; la pratique de la vie en Église.
Le Comité études et projets de la Conférence des évêques de France est particulièrement heureux de présenter cette étude, espérant qu’elle soit utile aux agents pastoraux qui travaillent auprès des adolescents et des jeunes adultes. Il remercie vivement Mgr Gérard Defois pour sa lecture attentive et précise, venant d’un pasteur expérimenté et chaleureux. C’est lui qui en a extrait ces deux citations qui valent d’être retenues : «Je sentais que j’avais quelque chose de plus qui m’aidait énormément : ma foi. Afin de les aider eux aussi, j’ai arrêté de la cacher.» Et «Dieu est la plus belle chose qui me soit arrivée dans ma vie.»
Monseigneur Laurent Ulrich,
Archevêque de Lille,
Président du Comité études et projets