« Les organisations syndicales sont un facteur décisif de développement »
Réflexion sur les syndicats, « éléments indispensables de la vie sociale », par Mgr Hervé Giraud, archevêque de Sens-Auxerre, prélat de la Mission de France, à l’occasion du 1er mai 2015, fête de saint Joseph, travailleur.
À la veille du 1er mai (fête du Travail), près de sept Français sur dix se disaient éloignés de tout syndicat. Plus d’un Français sur deux les jugeait inutiles. Or le pape Benoît XVI estimait, dans sa première encyclique, que « l’invitation de la doctrine sociale de l’Église, à susciter des associations de travailleurs pour la défense de leurs droits, est aujourd’hui plus pertinente encore qu’hier » (Caritas in veritate 25).
Nous le savons, les syndicats ont grandi à partir de la lutte des travailleurs, de la lutte du monde du travail pour la sauvegarde de ses justes droits. Aujourd’hui, toutes les professions cherchent à défendre leurs droits respectifs, parfois sans tenir compte d’autres réalités que les leurs et donc au détriment des plus faibles. Au contraire, la tâche des syndicats consiste en la défense des intérêts des travailleurs dans tous les secteurs où leurs droits sont en cause. Les syndicats constituent donc un élément indispensable de la vie sociale. Ils demeurent une institution importante pour défendre les justes droits des travailleurs dans le cadre du bien commun de toute la société. S’ils perdent de vue ce bien commun, ils se font du tort à eux-mêmes et ne sont plus qu’une voix catégorielle parmi toutes celles qui se multiplient.
Cependant, beaucoup aujourd’hui ne connaissent ni la réalité des syndicats, ni leurs buts, ni leurs objectifs. Certains les rejettent quand d’autres craignent de les rejoindre.
Face à l’évolution du monde du travail, au durcissement des cultures d’entreprise, à la mondialisation, et face à la multiplication de plus petites entreprises, faut-il se satisfaire de la diminution et même du morcellement du corps syndical ? La diversité des syndicalismes est connue : syndicalisme de contestation, de dénonciation d’injustices, de négociation, de compromis, de construction, de défense, de proposition… Or les syndicats ont aussi quelques points communs : ils sont une école de solidarité, de soutien collectif, d’émancipation, d’apprentissage de la parole, de réflexion et d’action. Beaucoup de syndicalistes ont appris à défendre des intérêts autres que les leurs. Leur lutte n’est pas une lutte contre les autres, une lutte pour elle-même, mais une lutte pour la justice sociale.
Ainsi, l’activité des syndicats entre dans le domaine de la politique entendue comme un souci du bien commun. Mais, en même temps, le rôle des syndicats n’est pas de « faire de la politique ». On doit, comme le soulignait saint Jean-Paul II, « souhaiter que, grâce à l’action de ses syndicats, le travailleur non seulement puisse « avoir » plus, mais aussi et surtout puisse « être » davantage » (Laborem Exercens 21). Pour réaliser pleinement leur humanité, il importe que les travailleurs participent à des associations pour la défense de leurs droits : les organisations syndicales, comme « facteur décisif de développement », « sont appelées à affronter les nouveaux problèmes de nos sociétés » (Benoît XVI).
Souhaitons donc que des expériences syndicales novatrices se développent tant au plan national qu’international, en se tournant aussi vers les travailleurs des pays en voie de développement. Les syndicats sont nécessaires pour la défense et la promotion du monde du travail, « surtout en faveur des travailleurs exploités et non représentés, dont l’amère condition demeure souvent ignorée par les yeux distraits de la société » (Benoît XVI).
Oui, les syndicats sont aujourd’hui plus pertinents encore qu’hier.
Mgr Hervé Giraud, archevêque de Sens-Auxerre, prélat de la Mission de France
1er mai 2015, saint Joseph, travailleur