Les Droits de l’Homme toujours en danger

Le 10 décembre marque l’anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, adoptée par les Nations Unies en 1948. L’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) agit dans trois domaines : abolition de la torture, combat contre la peine de mort et défense du droit d’asile. Le point sur la situation en France et ailleurs avec Anne-Cécile Antoni, sa Présidente.
 

Quelles sont les avancées ?

La principale, c’est le combat contre la peine de mort. Le nombre de pays qui l’ont abolie ou qui ont renoncé à l’appliquer, est passé, ces vingt dernières années, de 51 à 139, soit les deux tiers des Etats du monde. Les derniers sont le Burundi et le Togo. L’ACAT est très active au sein de la Coalition mondiale contre la peine de mort. C’est à ce titre que nous pouvons nous réjouir de cette avancée. Par ailleurs, nos adhérents correspondent avec des condamnés à mort, dans les couloirs de la mort aux Etats-Unis. Ils envoient des appels aux gouvernements pour demander la grâce de prisonniers ou bien l’abolition législative de la peine de mort pour ceux qui la pratiquent encore.
 

Où les Droits de l’Homme sont-ils en danger aujourd’hui ?

Depuis 2008 et malgré les espoirs suscités par l’arrivée au pouvoir du Président Medvedev, le bilan en Russie s’est alourdi. De nouvelles législations servent à museler l’opposition et les voix discordantes sont de moins en moins tolérées. La Russie est le pays du Conseil de l’Europe le plus souvent condamné par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour des actes de torture et de traitements inhumains ou dégradants. Face à cette situation, des défenseurs des droits de l’homme se mobilisent en Russie : des journalistes, des avocats, des dirigeants d’ONGs mais la répression envers ceux qui la dénoncent est implacable. Ces gens-là sont menacés, parfois hâtivement traduits en justice et certains sont assassinés. Un autre sujet de préoccupation pour nous est la Tunisie. C’est une destination soleil attrayante mais sous leur parasol, les vacanciers ne savent pas forcément que la liberté d’expression est en danger dans ce pays. La censure frappe de nombreux sites web et des dissidents sont harcelés. Les conditions de détention sont très pénibles. Nombre de tortures et de traitements inhumains sont imputables aux forces de sécurité. Dans la quasi totalité des cas, aucune enquête n’est ouverte. Les auteurs présumés de ces actes ne sont pas traduits en justice. Cette impunité nous soucie beaucoup. Nous sommes particulièrement bien informés car 120 groupes ou adhérents de l’ACAT parrainent un prisonnier d’opinion, lui adressent des lettres, entretiennent des relations avec sa famille.
 

Chaque mois, l’ACAT lance un appel. Celui de décembre 2009 concerne la France…

En octobre 2009, suite au démantèlement de la « jungle » de Calais où survivaient des migrants et des demandeurs d’asile, la France a renvoyé collectivement des Afghans vers leur pays en guerre, malgré les risques d’insécurité encourus. Un charter conjoint avec la Grande-Bretagne a décollé de Roissy pour Kaboul avec 27 personnes dont 3 Afghans. Pour deux d’entre eux, une demande d’asile venait d’être refusée. Ils ont été renvoyés avant d’avoir pu faire appel de cette décision. A travers ce cas humain douloureux, c’est la défense du droit d’asile qui est en jeu. La France n’a pas le droit de renvoyer des demandeurs d’asile vers un pays où ils risquent d’être soumis à la peine de mort, à la torture et à des mauvais traitements. Le droit d’asile est un devoir pour notre pays : il est inscrit dans le préambule de la Constitution française ! Nous appelons Eric Besson, le Ministre de l’Immigration, à suspendre les renvois forcés vers l’Afghanistan. Nous demandons à nos adhérents et à nos sympathisants de signer une lettre qui lui est adressée.
 

Quels sont vos points d’attention pour l’avenir ?

On a coutume de distinguer les droits de l’homme « première génération » qui sont les droits civils et politiques. La seconde génération est celle des droits économiques et sociaux. La troisième, les droits environnementaux. On entend dire que le combat pour les droits de la première génération serait désuet ou d’arrière-garde. Or je pense que sans ces premiers droits, on ne peut exercer ni les seconds ni les troisièmes. Ils conditionnent la possibilité d’exercice des deux autres générations de droits et constituent une clé dans ce combat. On ne peut pas séparer ces différentes catégories : elles sont imbriquées et interdépendantes.
 

Mutabar_Tadjibaeva


Victoire en Ouzbékistan

Rarement sur le devant de la scène, l’Ouzbékistan possède un des régimes les plus répressifs d’Asie centrale, construit sur un appareil policier redoutable. Procès scénarisés, arrestations arbitraires, opposants emprisonnés sont monnaie courante. Mutabar Tadjibaeva est une militante des droits de l’homme condamnée à 8 ans de prison pour avoir protesté contre un massacre de civils en 2005. Elle a été libérée après avoir reçu l’équivalent d’un camion de lettres de soutien. Elle s’est rendue en France en novembre dernier pour remercier l’ACAT.

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