L’ACAT publie son premier rapport sur la torture

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« Un monde tortionnaire. Rapport 2010 de l’ACAT-France » est un document choc qui sera diffusé auprès des adhérents mais aussi des parlementaires, des responsables religieux et des ONG. La France y est épinglée. Interview de François Walter, le nouveau Président de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT).
 

Pourquoi publier aujourd’hui ce rapport ?

C’est une décision que nous avons prise il y a un peu plus d’un an. Nous avons considéré que nous avions maintenant acquis la maturité et la compétence pour pouvoir faire chaque année le point sur la torture dans le monde. C’est aussi un engagement contractuel avec l’Union Européenne car l’UE apporte à l’ACAT-France un financement pour différents travaux dont ce rapport annuel. A partir de l’année prochaine, il sera traduit en anglais.
 

Il rassemble des chiffres mais aussi des articles d’actualité, des réflexions…

Il y a 3 parties. La première examine un certain nombre de pays à travers le monde : 22 pour la première édition. On poursuivra avec d’autres pays bien sûr. Avant chaque continent exploré, une introduction essaie de voir s’il y a des points communs – ou pas – entre les pays. La deuxième partie, ce sont des éclairages d’actualité : sur la politique de l’administration américaine, le témoignage d’une victime tunisienne, sur la pratique de la torture en détention. La troisième partie présente des articles de fond sur la torture : torture et médias, torture et médecine, le problème de soumission à l’autorité avec les émissions télévisées…
 

En Europe, vous épinglez aussi la France ?

On serait tenté de faire des catégories parmi les 200 pays du monde. Une catégorie de pays – un peu plus de 100 – dans lesquels la torture est pratiquée de façon régulière et en toute impunité. Nous en avons en a la preuve par des cas réels qu’on a pu révéler. La France n’en fait pas partie mais il y a quand même de grands pays comme la Russie, le Brésil, la Chine et les Etats-Unis. Puis un groupe d’un peu moins de 100 pays où la torture n’a pas lieu de façon régulière qui comprend notamment la France. Nous sommes très vigilants à ce qui se passe dans les prisons et dans les centres de rétention en France. Ce que nous pouvons reprocher à nos dirigeants, c’est la surpopulation des prisons, par exemple. Elle entraîne des traitements quelques fois humiliants et dégradants. Dans les centres de rétention, les conditions sont souvent très mauvaises. On note aussi des violences policières avec l’utilisation du Taser.
 

Y-a-t-il quand même de bonnes nouvelles ?

La bonne nouvelle, c’est la signature des traités internationaux qui interdisent la torture par beaucoup de pays. Dans le Rapport, un tableau récapitule les signataires. L’autre bonne nouvelle concerne les résultats que l’ACAT obtient dans ses actions : Nous contribuons à la libération de 200 personnes par an à travers le monde. De plus en plus de pays interdisent la peine de mort. Récemment, un traité contre les disparitions forcées a été ratifié. Fin décembre 2010, la convention entre en vigueur dans l’ensemble du monde, après un certain nombre de ratifications. Ce qu’on constate néanmoins, c’est qu’en dépit de la signature de ces traités, énormément de pays continuent de torturer. C’est ça la difficulté. Finalement, cela pose la question de l’évolution de cette pratique. Les rapports ultérieurs nous permettront de mieux l’évaluer. Nos sources sont les ACAT membres du réseau de la Fédération des ACAT. Nous travaillons très en liaison avec Amnesty International et d’autres ONG amies. Nous avons aussi nos contacts parmi les Eglises. Et nous faisons des missions dans un certain nombre de pays du monde. Mais comme vous pouvez l’imaginer, il n’y a aucune statistique là-dessus. Les Etats tortionnaires se gardent bien d’en faire la publicité.
 

Un Président protestant

Elu le 21 mars 2010, François Walter avait déjà été vice-président de l’ACAT de 2002 à 2008. Diplômé de l’Ecole Centrale de Paris, cet ingénieur retraité de l’industrie a eu plusieurs engagements au sein de l’Eglise Réformée de France. Pendant son mandat, il souhaite mettre en œuvre le plan stratégique élaboré par la précédente Présidente, Anne-Cécile Antoni. Le contrat avec l’Union Européenne devrait permettre à l’ACAT-France de renforcer ses équipes et d’élargir ses activités. La réalisation d’études sur 5 pays (Mexique, Guinée, Liban, Sri Lanka, Russie) ferait l’objet de voyages et de formations sur place à destination des défenseurs des Droits de l’Homme.

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