Trois questions à Mgr B. Podvin, Porte-parole de la CEF

Mgr Bernard Podvin

A la fin de l’assemblée plénière des évêques de France qui s’est tenue du 3 au 8 novembre à Lourdes, Mgr Bernard Podvin, porte-parole des évêques de France, revient sur le contenu des discussions et le message des évêques donné en clôture de l’assemblée.

L’Assemblée plénière a eu comme cœur de sujet une réflexion sur l’avenir des communautés chrétiennes. Quelle est la préoccupation des évêques? Y a-t-il des propositions?

L’avenir n’est évidemment pas cherché dans la boule de cristal. Il est éclairé par l’Esprit-Saint. Il se construit dans la complémentarité des vocations. En cette année sacerdotale, l’estime du ministère presbytéral est grande. Le besoin de diacres est important dans une société en mutation. La vie religieuse apporte son inestimable charisme. Les laïcs, en mission ecclésiale, et insérés dans le monde, sont irremplaçables dans leur vitalité. L’Assemblée a concrètement écouté le témoignage de quatre évêques. Ils ont décrit la situation de leurs diocèses. Cela a éveillé en chacun le désir de faire de même. La réflexion épiscopale sur la visibilité de l’Eglise a également donné le ton. Il ne s’agit plus de tergiverser. Soyons nous-mêmes. Revisitons notre tradition, n’ayons pas peur de dire notre identité catholique sans prosélytisme. L’Assemblée plénière a fait aussi le point sur l’Enseignement supérieur catholique. Être au rendez-vous, par la recherche, de la relation entre la foi et la raison. Contribuer à l’intelligence de cette visibilité. Comment comprendre nos contemporains tout en leur partageant une parole venue d’un autre? Benoît XVI ne vient-il pas de rendre un vibrant hommage à Paul VI qui souhaitait que l’Eglise soit «conversation» avec le monde ? Nous ne sommes pas encore au stade d’une publication de propositions mais l’échange vécu à Lourdes fut serein, constructif et prometteur.

Lors de la messe télévisée, le cardinal A. Vingt-Trois invite à une religion du cœur plus qu’à une religion des apparences en acceptant de reconnaître que nous sommes des « serviteurs inutiles ». Comment traduire ce message dans un monde en quête de sens?
Il est exact que tout pourrait nous inciter à chercher l’immédiateté et la rentabilité première, y compris en matière religieuse. Les évêques, comme l’ensemble des chrétiens, sont conscients de la pauvreté des moyens humains et matériels dont dispose l’Eglise aujourd’hui. Peut-être est-ce cela qui renforce le lien avec Jésus unique serviteur. Le dynamisme des communautés locales est d’autant plus émouvant qu’il provient souvent de cette pauvreté première. A Lourdes, les évêques ont évoqué l’importance de la parole de Dieu, de la fraternité entre baptisés, de l’ouverture des communautés à la rencontre de l’Autre. Le compte-rendu de Mgr Edmond Djitanghar, évêque de Sahr (Tchad) était éloquent. La rencontre avec M. Jacques Barrot, concernant les politiques migratoires de l’Europe, se situait dans une chaude actualité. Quel évêque ne se sent concerné aujourd’hui par les enjeux de la mobilité contrainte de millions d’hommes pour raison de guerre, de climat, de faim ? L’Europe doit être responsable et cohérente. En 2050, elle ne représentera plus que 3% de la population mondiale. Ses besoins démographiques seront donc immenses. Elle ne survivra à long terme que si elle cultive sa tradition d’accueil même si, dans le court terme, la gravité de la crise économique oblige à limiter le flux migratoire. Jacques Barrot et les évêques ont redit l’importance vitale de l’aide au développement des pays d’origine. Les droits inaliénables de la personne migrante, surtout en danger, doivent être préservés.

Au terme de l’Assemblée plénière, les évêques ont publié une Lettre aux communautés chrétiennes. Quel message contient-elle?
Depuis plusieurs mois, les évêques analysent méthodiquement ce qu’on appelle « les nouvelles pauvretés ». Ce n’est pas un slogan. Il y va de l’Evangile. La Bonne nouvelle est annoncée aux pauvres. Les détresses sociales, psychologiques et culturelles sont multiples. La Lettre aux communautés chrétiennes est vigoureuse. Elle conforte ceux qui agissent dans l’Amour de leurs frères. Elle éveille à être encore plus attentif à celui qui est vulnérable. En vue de Noël, les évêques trouvent fondamental de ne pas vivre un Avent formaté par les habitudes de consommation. Et si Noël se préparant autrement suscitait un « vivre autrement » ? A cet égard, la démarche de l’Eglise catholique concernant la bioéthique va dans le même sens. Il s’agit comme pour les nouvelles pauvretés de faire la première place et de protéger l’infiniment petit. De la naissance à la mort, le prix de la vie est inestimable. L’avenir des communautés chrétiennes trouvera dans cette attention aux pauvres, une source indéniable. Plus une communauté s’ouvre à l’autre, plus elle reçoit de Dieu la consistance de son avenir.