“Découvrir le sens de l’appartenance diocésaine”

Le 3 novembre 2020, le diocèse de Belfort-Montbéliard achève l’année de ses quarante bougies. Un rassemblement festif exceptionnel était prévu en avril dernier pour célébrer et vivre ce temps fort autour du thème de la fraternité. Les conditions sanitaires en ont décidé autrement. Mais tout ce qui a été préparé est réintroduit au cœur des orientations pastorales pour les trois années à venir. Rencontre avec Mgr Dominique Blanchet, évêque du diocèse de Belfort-Monbéliard. Par Florence de Maistre.

En quoi a-t-il été important de célébrer cet anniversaire ?

Dominique BlanchetPour un diocèse, quarante ans c’est vraiment jeune ! Nous sommes encore dans la période de fondation. L’unité de notre diocèse est particulière. Elle couvre l’aire urbaine Belfort – Montbéliard, ne correspond pas à un département, mais en traverse trois différents. Il nous faut d’autant plus travailler la conscience de l’appartenance au diocèse, c’est très précieux. Nous avons préparé cet anniversaire depuis trois ans pour redécouvrir le sens de ce faire Église ensemble. Nous avons changé de logo et ajouté la mention Église catholique en Nord Franche-Comté. Cette appellation est plus parlante, courante dans la vie civile. Nous avons également développé un cycle de réflexion sur les sacrements de l’initiation chrétienne, en approfondissant le baptême, puis l’eucharistie et en lançant un appel très large à la confirmation. C’est cette démarche de fond sur la compréhension de ce que représente l’appartenance diocésaine qui compte le plus, indépendamment de la fête des quarante ans. Bien sûr, nous avons souhaité marquer l’évènement. Cet anniversaire est l’occasion d’évoquer l’histoire avec une exposition et un livre. Ce dernier conçu comme un album de famille avec les visages des diocésains est très apprécié. Il permet de se rappeler, de se raconter, ce qui me plait et me touche beaucoup. Le grand rassemblement Fraternité en rêv’, prévu à l’Axone de Montbéliard, les 18 et 19 avril a été compromis. Nous aurions dû être 4000 personnes, nous étions trois dans la chapelle de l’évêché ! Très vite, tous les membres de l’organisation se sont mis d’accord. La question n’était pas d’accepter l’annulation de la manifestation mais d’envisager sa transformation. Le rassemblement, comme le livre, l’exposition et la réflexion déjà menée étant un des moyens pour découvrir le sens de l’appartenance diocésaine.

Qu’est-ce qui caractérise l’histoire de votre territoire ?

Monument commémorant la défense de la ville contre la Prusse en 1870

Je pense qu’il faut remonter à 1870, c’est nécessaire. À l’époque, tous les diocèses sont déjà constitués. Nous sommes ici sur une zone frontalière, qui n’est pas stable au niveau ecclésiale. La commune de Bavilliers a connu, par exemple, six diocèses différents depuis la révolution française ! Belfort appartenait au diocèse de l’Alsace, cette dernière passant à l’Allemagne, le territoire est pris en charge par le diocèse de Besançon qui comprend déjà la Haute-Saône et le Doubs. De nombreuses entreprises, dont Alstom (Alsace-Thomson), s’installent sur cette zone peu peuplée, restée française, qui devient un véritable bassin industriel florissant, avec une histoire de tradition catholique. Or à 10 km de là, vers Montbéliard, tout le pays est protestant depuis le XVIe siècle ! Quelle complexité ! D’autant que Peugeot s’installant à Sochaux fait venir de la main d’œuvre polonaise, portugaise, italienne ou encore espagnole, avant la deuxième émigration plutôt maghrébine, soit une belle diversité religieuse ! Cette aire urbaine, historique, bousculée convoque un certain vivre ensemble pour les besoins de l’industrie. En 1970, l’archevêque de Besançon dit ne plus comprendre cette partie de son diocèse trop vaste. Il n’arrive plus à servir suffisamment la communion humaine de ce territoire. Après de nombreuses consultations, le pape crée le diocèse de Belfort-Montbéliard le 3 novembre 1979 et nomme Mgr Eugène Lecrosnier à sa tête.

Quels éléments marquants de ces quarante dernières années retenez-vous ?

La mission dans notre diocèse repose sur ces trois éléments essentiels : servir un mystère de communion à travailler, se faire proche de tous, s’engager au niveau oecuménique. Mgr Lecrosnier, proche de la mission ouvrière, retisse les liens. On dit qu’au bout de dix ans, il connaissait toutes les routes du diocèse par cœur !
Le deuxième évêque, Mgr Claude Schokert, s’est appliqué à développer des formations bibliques, à développer l’écoute et l’intelligence de la Parole de Dieu. Il crée aussi la maison diocésaine, au centre l’aire urbaine, à Trévenans, décision que je confirme aujourd’hui en l’élargissant. Ce choix étonne, l’évêché étant à Belfort. Mais on trouve là aujourd’hui l’hôpital du Nord Franche-Comté, la chambre des métiers, et de nombreux autres services. Les lieux de fondation ne sont pas encore tous posés. Je suis le troisième évêque et je viens de créer le service des archives. Jusqu’ici, la transmission était encore orale. Mais il y avait des oublis dans l’histoire et urgence à la collecter ! Je poursuis la dynamique au niveau oecuménique et interreligieux. C’est une évidence pour nous ! Nous nous retrouvons tout à fait dans ce que le pape décrit dans sa dernière encyclique Fratelli tutti, dans cet appel pour notre diocèse.

Quelles sont vos orientations pastorales pour les années à venir ?

Le 12 septembre dernier, nous avons vécu une journée de rentrée en plein air, à Mandeure sur le site de l’église paléo-chrétienne du IVe siècle. Quelle étonnante source d’évangélisation ! Cent dix jeunes et adultes y ont reçu le sacrement de confirmation. D’autres célébrations de confirmation sont prévues d’ici la fin d’année. Au cours de ce temps fort, j’ai annoncé la reprise des thèmes autour de la fraternité, initialement portés par notre grand rassemblement, pour nos orientations pastorales. Cette métamorphose de l’évènement en axes de réflexion n’est pas douloureuse. Elle s’inscrit dans une dynamique de vie ! Le Covid nous a bousculé : notre chance est de savoir ce que l’on veut vivre et de s’adapter ! En conseil épiscopal, nous avons choisi ce fil conducteur : accueillir l’appel de Dieu à être protecteur, gardien de la terre, de nos frères, de la société. J’encourage, cette année, les diocésains à lire l’encyclique Laudato Si’ et à entrer dans le mystère de la Création. Nous nous intéresserons au label Église verte. L’an prochain, nous approfondirons la fraternité à laquelle nous sommes appelés en écho à la dignité humaine de chacun. Dans trois ans, je voudrais engager la réflexion sur la nécessité de l’engagement politique ou associatif des chrétiens pour servir le bien commun. Par ailleurs, pour la fête à l’Axone nous envisagions un investissement important. Nous avions fait appel à des mécènes qui souhaitent soutenir la fraternité en Nord Franche-Comté, dont la participation comptait pour plus de la moitié de notre budget. Comment transformer cette dimension-là ? Nous nous sommes retournés vers eux, en leur précisant le choix du diocèse de conserver son investissement pour créer un fond de dotation et soutenir les initiatives locales de solidarité, suite aux épreuves de la pandémie. Nombreux sont ceux qui nous suivent.

Qu’est-ce qui encourage votre mission au service du diocèse de Belfort-Montbéliard ?

Je vois la joie des diocésains, des confirmés. Je n’entends pas de regret par rapport à l’annulation de la fête d’anniversaire. Parce qu’elle est transformée. N’ayons pas peur des fragilités de l’Église : notre force est de rester attaché à l’essentiel ! Ça me donne du courage ! Il y a aussi les nouveautés qui ont surgi avec promesse, par exemple, les sœurs Amantes de la Croix arrivées il y a quatre ans. Vietnamiennes, elles apprennent le français et font des merveilles. Elles sont entrées dans notre histoire, dans notre diocèse qui est une terre d’accueil. Elles ont une capacité toute simple et remarquable à nouer des relations. Elles sont le beau signe, lumineux, d’une présence. Je vois aussi les deux jeunes adultes qui sont entrés en propédeutique. Sans préjuger de la suite, ils sont déjà pour nous un signe fort d’encouragement ! Je repense à l’exhortation apostolique de Jean-Paul II sur l’évêque qui doit être « serviteur de l’Évangile de Jésus-Christ pour l’espérance du monde ». Je veux porter cette espérance en ayant bien conscience de toutes nos fragilités. Je prie la Providence et je vois que Dieu accompagne fidèlement son Église !

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