Homélie du dimanche 14 août

Dimanche 14 août 2022

VINGTIEME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

Références bibliques :

Lecture du livre du prophète Jérémie. 38. 4 à 10 : “Que cet homme soit mis à mort.” 
Psaume 39 :”Il m’a tiré de l’horreur du gouffre, de la vase et de la boue.” » 
Lecture de la lettre de saint Paul aux Hébreux. 12. 1 à 4 :”Jésus qui est à l’origine et au terme de la foi. » 
Evangile selon saint Luc : 12. 49 à 53 :” Comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! » 

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“Par cette eucharistie, Seigneur, tu nous as unis davantage au Christ. Et nous te supplions encore. Accorde-nous de lui ressembler sur la terre et de partager sa gloire dans le ciel.”

Cette prière, qui conclut la communion de la messe de ce jour, est lourde de conséquence si Dieu nous prend au mot de notre demande, car elle rejoint ce que le Christ disait à ses disciples et que la liturgie nous rappelle aujourd’hui : “Je suis venu apporter un feu sur la terre. Comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême. Comme il m’en coûte d’attendre qu’il soit accompli !”

LE BAPTEME DU CHRIST

C’est durant sa dernière montée à Jérusalem que Jésus livre cette confidence à ses apôtres. Si la Passion est toute proche, la Résurrection l’est aussi. Il utilise le même mot lors de l’annonce de la Passion et de sa mort à Jacques et à Jean en réponse à la demande de leur mère d’être aux premières places du Royaume. “Pouvez-vous être baptisés du baptême dont je vais être baptisé?” (Marc  10. 38)

Dans la tradition biblique, cette traversée de l’eau évoque le passage de la Mer Rouge qui anticipe la Pâque du Seigneur. Saint Paul développera cela dans sa lettre aux Romains. En célébrant leur baptême d’eau, les chrétiens s’associent à cette mort et à cette résurrection :”Ignorez-vous que nous qui avons été baptisés, nous l’avons été dans sa mort. Nous avons été ensevelis avec lui. (Romains 6. 3)

Mais, en même temps que s’accomplit le passage à cette vie, nous devons nous mettre à l’unisson de celle du Christ et vivre sous la loi de la grâce, quoi qu’il nous en coûtera. (Romains 6. 6) Pour que se réalise l’homme nouveau, cette mort au péché doit être quotidienne en même temps que totale. (Colossiens. ch. 2 et 3)

QUELLE PAIX ?

Les disciples sont prévenus avec clarté et précision. L’Evangile ne s’épanouit pas dans un climat douceâtre et lénifiant, où tous les conflits sont évacués, tous les angles arrondis. La charité elle-même est un combat contre toutes les formes de ténèbres qui subsistent au cœur de l’homme et dans la société. L’Evangile ne permet pas de compromis. Il nous faut alors savoir trancher et retrancher.

La paix du Christ n’est pas ce sourire sentimental, si chaleureux soit-il, qu’on échange au seuil de la communion en chaque messe. Elle est le fruit de l’union de tous dans le Corps du Christ (Colossiens 3. 15). Elle jaillit quand on se préoccupe des désirs de l’Esprit-Saint qui nous mène ainsi à la vie et à la paix (Romains 8. 6), au prix de la mort, comme ce fut pour le Christ.

Lorsque saint Luc transmet ces paroles qui exprimaient, devant les apôtres, l’intensité de la vie intérieure du Christ durant sa “montée” à Jérusalem :”Il m’en coûte d’attendre”, l’évangéliste les transmet dans le contexte de l’Eglise de son temps. Les premiers chrétiens vivaient des heures difficiles. Les familles se déchiraient s’opposant au converti, livrant le nouveau chrétien aux tribunaux. Le message évangélique se faisait entendre dans un monde qui en était bien éloigné.

Incompréhension, conflits, persécution, tout cela à cause de Celui dont on disait qu’il allait fonder la grande fraternité de l’amour. Luc est le disciple de saint Paul qu’il a entendu traduire ainsi les paroles du Seigneur aux chrétiens de Colosses pour leur comportement vis-à-vis de ceux qui, dans leurs familles elles-mêmes, ne comprennent pas ce feu nouveau qui brûle et dresse “le père contre son fils et le fils contre son père, la mère contre la fille et la fille contre la mère.”

Cette traduction des paroles du Seigneur est détaillée par saint Paul : ”Puisque vous êtes élus, sanctifiés, aimés par Dieu, revêtez donc des sentiments de compassion, de bienveillance, d’humilité, de douceur, de patience. Supportez-vous les uns les autres. Et si l’un a un grief contre l’autre, pardonnez-vous mutuellement. Comme le Seigneur vous a pardonné, faîtes de même vous aussi. Et par-dessus tout, revêtez l’amour. C’est le lien parfait.” (Colossiens 3. 12 et 13)

VIVRE DANS LA FOI

Dimanche dernier, la lettre aux Hébreux nous donnait de regarder la foi d’Abraham et d’en déduire quelle devait être notre attitude quand Dieu nous appelle à nous expatrier de nos habitudes pour rejoindre la Terre Promise du Royaume.

Aujourd’hui, la même lettre aux Hébreux nous entraîne vers Celui qui est à l’origine et au terme de la foi. “Courrons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus qui est à l’origine et au terme de la foi.” (Hébreux 12. 2)

Renoncement, humiliation, hostilité, jusqu’au sang…. (Hébreux 12. 4) C’est ainsi qu’il a vécu son baptême. C’est ainsi qu’il nous demande de le suivre. “Là où je suis, là aussi sera mon serviteur.” (Luc 12. 26)

C’est une option décisive qui nous est demandée, « les yeux fixés sur Jésus. ».

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Aujourd’hui nous connaissons aussi des situations de rupture, même au sein de nos propres familles. La vie chrétienne est un choix personnel qui se vit au coeur d’une société qui ne la comprend pas. Il interfère avec tant d’habitudes qu’il contredit, il intervient au coeur de tant de relations qu’il modifie jusqu’à les rompre.

Se convertir … adhérer au Christ. La foi ne se transmet pas de manière presque automatique.“ C’est toute une partie de mon existence déjà vécue que je dois abandonner, c’est vivre avec ma femme une union de longue date dans laquelle s’introduit un élément qu’elle ne comprend pas et ne partage pas, c’est éveiller mes enfants à cette dualité et les laisser choisir à leur tour sans renier ni leur père ni leur mère.” Il s’était écoulé bien des années avant que la décision soit prise et que la paix du Christ envahisse le coeur de ce converti.

“Pour ceux qui t’aiment, Seigneur, tu as préparé des biens que l’oeil ne peut voir. Répands en nos coeurs la ferveur de ta charité, afin qu’en t’aimant en toute chose et par-dessus tout, nous obtenions l’héritage promis qui surpasse tout désir.”

… “En toute chose et par-dessus tout”, des mots qui pèsent lourds quand on les relie aux paroles de saint Paul et du Christ. “Je suis venu allumé un feu sur la terre.”

année liturgique B