Homélie du dimanche 24 mai 2020

Dimanche 24 mai 2020
Septième dimanche de Pâques

Références bibliques :

Lecture des Actes des Apôtres : 1. 12 à 14 : « D’un seul coeur, ils participaient à la prière. »
Psaume 26 : « La seule chose que je cherche, c’est d’habiter la maison du Seigneur. »
Lettre de saint Pierre : 1 Pierre 4. 13 à 16 : » afin d’être dans la joie et l’allégresse quand sa gloire se révélera. »
Evangile selon saint Jean : 17. 1 à 11 : « La vie éternelle, c’est de te connaître. »

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REVE OU UTOPIE ?

Cette petite communauté qui attend la venue de l’Esprit de Dieu nous paraît bien loin de celles dans lesquelles nous vivons. Les conditions ne sont pas les mêmes. Ils sont encore proches de Jésus, apôtres ou disciples qui sont là autour de la Mère de Jésus, Marie, et même les frères de Jésus qui ne l’avaient pas compris à Nazareth ou à Capharnaüm ( cf. Matthieu 12. 48)

Mais, après la Résurrection, ils rejoignent les disciples qu’ils ont connus durant la vie publique de Jésus. La description que donne saint Luc de la réalité vécue par la communauté de Jérusalem n’est peut-être pas celle qui est vécue dans nos communautés paroissiales ou ecclésiales

. » Assidus à la prière »…..Nos rassemblements du dimanche connaissent des arrivées tardives, des participations irrégulières, des fidèles parfois les uns éloignés des autres, malgré le rite du « baiser de paix ».

Les concentrations urbaines ne favorisent pas cet esprit communautaire, mis à part un petit groupe « dévoué ».

Jean Paul II l’a souvent évoqué d’ailleurs dans ces Lettres Apostoliques aux Eglises des divers continents, où l’Eglise connaît l’anonymat des mégapoles deshumanisantes.

Ce n’est peut-être pas le lieu d’en parler ici, mais ces textes de Jean Paul II sur la vie des communautés chrétiennes dans les mégapoles européennes ou américaines méritent qu’on les connaisse, s’y arrête, qu’on les médite, si l’on veut redonner un même cœur, vivre une même prière dans ces « immeubles de solitude » où les hommes attendent, sans la connaître, la Vie de Dieu.

TE CONNAITRE

L’Evangile de ce dimanche nous confie ce que la Tradition appelle, « la prière sacerdotale de Jésus. »

Au moment d’entrer dans le grand silence de sa Passion, le Christ, à haute voix, parle à son Père et ces paroles ont une grande signification. « La vie éternelle, c’est qu’il Te connaissent, Toi et Celui que tu as envoyé. » Cette vie éternelle n’est pas la survie après la mort, puisqu’elle est, dès notre propre existence, une naissance, une « con-naissance » de Dieu.

Nul ne peut vivre de solitude pour s’épanouir. Il doit naître de l’autre, naître par l’autre dans le même temps qu’il donne à l’autre une véritable naissance quotidienne.

L’échange, le don et le partage créent la vie, comme elle est engendrée dans l’échange unique du Père, du Fils et de l’Esprit.

Saint Jean a retenu et médité cette parole de Jésus à son Père : » Je T’ai glorifié sur la terre…Je leur ai donné la Gloire que Tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous sommes un, moi en eux comme toi en moi, pour qu’ils parviennent à l’unité parfaite » (Jean 17. 23).

En la reprenant, saint Irénée écrivait vers 180, cette formule célèbre : »La Gloire de Dieu, c’est l’homme vivant et la vie de l’homme, c’est la vision de Dieu ».

Cette gloire, maintes fois évoquée dans ces dernières paroles du Christ, signifie que c’est la plénitude de la vie qui se réalise en Dieu. C’est cela la Gloire. Et elle peut aussi se réaliser dans les disciples. La vie trinitaire est une vie d’unité. Quand nous vivons cette unité dans le Christ, nous sommes unis à dans la vie trinitaire. Et c’est une unité qui n’a rien à voir avec une simple sociabilité de bon aloi.

Il est difficile, même impossible d’exprimer ce mystère en quelques phrases. Et plus on en parlera sans le vivre dans le Christ, plus on risque de le « diluer ». Nous avons à le faire pressentir en une méditation priante et c’est à chacun de s’y introduire par la contemplation de la réalité vivante du Christ.

Pour reprendre les termes de saint Irénée, nous sommes des hommes vivants avec le seul Dieu, avec le vrai Dieu. « Ce que Tu m’as donné, je veux qu’ils soient eux aussi avec moi et qu’ils contemplent la Gloire qui est mienne et que tu m’as donnée. » (Jean 17. 24) …. « La Vie éternelle, c’est qu’ils Te connaissent, Toi le seul Dieu, le vrai Dieu. »

UNE DOUBLE DEMARCHE

« J’ai fait connaître Ton nom aux hommes… Ils ont gardé fidèlement Ta parole…. maintenant, ils savent… ils ont cru… » (Jean 17. 8)

Cette Vie éternelle résulte d’une double démarche : celle de Jésus qui la donne et celle de l’homme qui accepte de la recevoir et en vit au quotidien par la Foi. Plusieurs verbes actifs sont ici additionnés : connaître, garder, savoir, recevoir, croire.

La connaissance de Dieu est à prendre au sens vital : « Celui qui connaît Dieu par le Fils a déjà la vie éternelle », nous dit saint Jean.

Elle n’est pas à prendre et à comprendre au sens intellectuel du terme, elle ne s’impose pas de l’extérieur. Elle s’accueille librement. Si elle naît par la grâce de Dieu dans le mystère de la foi, elle s’épanouit dans la lumière d’une vie quotidienne toute disponible à cet accueil de la grâce. « La lumière est venue dans le monde et les ténèbres ne l’ont pas accueillie. » (Jean 1. 5 à 11)

En chacun d’entre nous, il y a une part de ténèbres, celles du monde au sens johannique du terme. Une part de ténèbres qui, parfois, n’accueille pas le Christ selon son attente. C’est pourquoi il ne peut pas prier pour que ce monde reste comme il est, un monde de ténèbres.

Il ne peut que demander à son Père que la lumière existe afin qu’elle vienne en chaque homme : « Pour qu’ils aient ma joie en plénitude… Je prie pour ceux que Tu m’as donnés parce qu’ils sont à Toi. Garde-les dans Ton nom. » (Jean 17. 13) « Pour qu’ils aient la Vie en abondance » avait-il dit à ses disciples (Jean 10. 10).

Judas s’est enfoncé dans la nuit. (Jean 13. 30) Au moment où les ténèbres couvrent le Calvaire, le bon larron, lui, entre dans la plénitude de la Gloire, parce qu’il a refusé de s’enfoncer dans la nuit de sa faute : »Garde-le dans Ton nom. »

J’AI ACCOMPLI L’OEUVRE QUE TU M’AS DONNE A FAIRE

Au soir du Vendredi-Saint, Jésus pouvait terminer ainsi sa dernière prière sur la croix : » Tout est accompli » (Jean 19. 30). C’est le mot même qu’il avait prononcé, le soir du Jeudi-Saint, dans sa prière au Cénacle : »Je t’ai glorifié sur la terre, car j’ai accompli l’oeuvre que Tu m’avais donnée à faire. » A nous maintenant d’accomplir cette oeuvre parmi et pour les hommes, nos frères : » Comme Tu m’as envoyé dans le monde, je les envoie dans le monde…je prie pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. » (Jean 18 à 20)

Il confie sa mission de Sauveur aux croyants que nous sommes.

« Nous Te rendons grâce car Tu nous as choisis de servir en Ta présence. » (prière eucharistique 2)  » Remplis de l’Esprit-Saint, accorde-nous d’être un seul corps et un seul esprit dans le Christ. (prière eucharistique 3) « 

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« L’Esprit de Gloire, l’Esprit de Dieu repose sur vous », repose sur nous, nous dit saint Pierre en ce dimanche qui précède l’effusion de l’Esprit. (1 Pierre 4. 14) « Que l’Esprit Saint fasse de nous une éternelle offrande à Ta Gloire. » (prière eucharistique 3) Quelle richesse pour notre vie spirituelle si nous méditions, à la lumière de la prière du Christ en sa dernière heure, ces prières eucharistiques que l’Eglise nous propose !….

année liturgique B