Qui ne souhaiterait mourir dans la dignité ?

Cette année, le 2 novembre, journée où les chrétiens prient pour les défunts, est devenu une journée retenue – récupérée – par ceux qui sont partisans de mourir dans la dignité.

Qui d’ailleurs serait opposé à cela ?

Tout être humain souhaite mourir dans la dignité. Mais quelle est cette dignité ?
Qui va nous dire à quel moment un homme, une femme, un enfant, n’a plus la qualité d’un être humain et doit quitter le monde par un acte d’euthanasie active ?

Pour certains, c’est l’apparition des premières rides ou la perde des cheveux qui peut être psychologiquement intolérable, et conduire au désir de quitter la vie.

La foi des chrétiens conduit à toujours affirmer l’importance de la vie, et pour cela de défendre la vie lorsque celle ci est abîmée, lorsqu’on lui porte atteinte. Les chrétiens fondent cet engagement sur la résurrection du Christ. Pour les chrétiens, c’est la vie qui est la première. Et cela, parce que le Dieu de la Bible est le Dieu de la vie : « Si le Christ n’est pas ressuscité, notre foi ne veut rien dire » a écrit saint Paul.

La foi en la vie éternelle donne du sens à notre vie terrestre : au-delà de la mort la vie continue, dans l’éternité ; ce que nous construisons ici-bas, surtout par nos relations d’amour et de fraternité, n’est pas voué à l’anéantissement du tombeau.
Et cependant, la foi en la vie éternelle manifeste le relatif de cette vie terrestre : elle n’est pas le tout de notre vie, elle n’est pas toute notre vie : il y a un au-delà ! Pour cela, en raison de la résurrection et de la vie éternelle, la foi n’appelle pas à défendre la vie à tout prix, c’est-à-dire au prix de la déchéance, ou au prix de souffrances intolérables.

Maintenir la vie terrestre à tout prix, au prix de toutes les techniques d’acharnement, n’est pas la logique de cette foi en la résurrection.

Pour autant, les chrétiens comme bien d’autres, se refusent à supprimer délibérément une vie, autrement dit à pratiquer l’euthanasie active.
Ils ne le disent pas de manière abstraite, comme si eux-mêmes n’étaient pas eux-mêmes affrontés à ces situations.
Celui qui s’exprime ici a perdu son père d’un cancer, à l’âge de 73 ans, et a lui-même été opéré et traité pour un cancer.

Alors, lorsque l’un d’entre nous est malade, quel est le rôle de la famille, des amis, du personnel médical ? Est-ce de déclarer que cette personne n’a plus la qualité d’un être humain, et de l’encourager à souhaiter sa propre mort ?
N’est-ce pas plutôt de l’aider à comprendre que, même blessée, même ayant perdu certaines de ses capacités, l’humanité est bien là, elle doit être reconnue et respectée. Le choix est mal posé lorsqu’il l’est en terme d’une alternative entre, ou bien les souffrances, ou bien l’apaisement de la mort.
Choisir c’est plutôt à la fois travailler au soulagement des souffrances corporelles grâce aux techniques qu’il faut toujours développer ; et à la fois s’engager dans l’accompagnement humain, affectif, religieux même, qui aide à se reconnaître comme participant toujours à la destinée humaine.

+ Pascal Wintzer, Evêque auxiliaire à Poitiers