Violences à Calais, les migrants au fond du tunnel

centre de migrants de SangatteRéflexion de Mgr Marc Stenger, Evêque de Troyes, Président de Pax Christi France, sur la situation des migrants à Calais après le décès mercredi 29 juillet 2015 d’un Soudanais qui tentait de traverser le tunnel sous la Manche.

Quand un tunnel sous la mer reliant deux pays – étonnante réussite technologique – devient un lieu de tension, de violence et de mort, il est temps pour nous de nous réveiller. Ces hommes et ces femmes qui s’entassent dans les « no man’s land » autour de la ville de Calais, attendant de passer clandestinement en Angleterre ne sont pas des meurtriers ni des terroristes. Souvent jeunes, ils ont, depuis des mois, risqué le tout pour le tout, pour trouver une vie meilleure, loin des conflits et des persécutions de leurs terres d’origines.

Si prendre des mesures de sécurité et de contrôle est légitime, Pax Christi France considère que la question des migrants ne pourra pas se régler uniquement par de tels ajustements techniques. Le risque est toujours grand d’oublier que nous avons à faire à des êtres humains qui ont une histoire et une dignité. Et non pas à des chiffres dans des colonnes statistiques.

Ce que les violences à Calais révèlent, c’est d’abord le manque de cohérence dans nos politiques d’accueil et nos législations du travail sur ce continent. Qui sont les responsables politiques français ou européens qui œuvrent activement pour changer cela ?

Ce que les violences à Calais révèlent, c’est aussi notre difficulté à prendre les moyens financiers et humains pour accueillir de manière adaptée ces populations. Déplacer les camps roms par la force, multiplier les centres de rétention administrative particulièrement hermétiques au travail des associations humanitaires, laisser des personnes se marginaliser dans les zones de passage et les frontières, répartir les migrants politiques sous forme de quotas, c’est refuser de chercher des solutions nouvelles d’intégration ici ou de résolution des conflits là-bas qui pourraient changer vraiment la donne.

Ce que les violences à Calais révèlent, c’est l’existence de flux d’exils de populations venus de Syrie, du Sud-Soudan, d’Erythrée et d’autres zones de conflits et de non-droit bien connus. Ils révèlent aussi l’existence de réseaux de passeurs qui organisent ces filières de la misère, par la contrainte, la violence et le vol. Sommes-nous sûr de faire assez, en termes de diplomatie, de négociations et de décisions pour cesser d’alimenter les trafics d’armes ou de ressources naturelles qui entretiennent ces filières et sèment l’anarchie dans ces terres d’émigration ?

Ce que les violences à Calais révèlent, enfin, c’est aussi l’existence de nombreuses personnes sur place qui luttent, à leur mesure, pour donner à manger, offrir une douche ou un lieu de repos à ces personnes en exil. D’autres développent des projets nouveaux pour aider ces personnes à trouver leur place parmi nous, dans des villes ou des villages où ils pourront apporter leur énergie et leur humanité, au service de tous. Pax Christi France veut leur rendre hommage et soutenir ces initiatives.

Monseigneur Marc Stenger,
Evêque de Troyes, Président de Pax Christi France

Catherine Billet,
Déléguée nationale

Dominique Lang, aa
Aumônier national

 

A écouter

Entretien avec le père Jean-Marie Rauwel,  prêtre de la paroisse Saint-Vincent-de- Paul en Calaisis par Radio Vatican

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