Homélie du dimanche 10 décembre

Dimanche 10 décembre 2017
Deuxième dimanche de l’Avent

Références bibliques :

Lecture du prophète Isaïe. 40. 1 à 11 : »Elève ta voix avec force, toi qui portes la Bonne Nouvelle. »
Psaume 84 : « J’écoute ce que dira le Seigneur. »
Lettre de saint Pierre, apôtre. 1 P. 3. 8 à 14 :« Le Seigneur n’est pas en retard pour tenir sa promesse. »
Evangile selon saint Marc. 1. 1 à 8 : « Jésus-Christ, le Fils de Dieu. »

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LA PERSONNALITE DE JESUS

Saint Marc nous dit son projet, dès les premières lignes de son Evangile et par une phrase d’une grande intensité :

– Une relecture du ministère de Jésus à la lumière de sa personnalité : il est le Fils de Dieu fait homme.
– L’enracinement de ce ministère dans les perspectives prophétiques de l’Ancien Testament qui n’est pas renié, mais rendu complet.
– La perspective qui nous conduira jusqu’à la Résurrection.

Nous ne devons lire aucun des moments de la vie de Jésus, sans garder sous-jacente cette triple affirmation, sinon nous amenuisons la force de la Bonne Nouvelle. Il est le Christ, c’est-à-dire le Messie attendu. Marc souligne cette divinité en mentionnant la modification que le Christ a apportée au texte même d’Isaïe, lors de sa prédication à Nazareth.

Dieu dit par son prophète : « Voici que j’envoie mon messager devant ma face. » L’évangile de Marc, comme celui de Luc, transpose cette affirmation : « Voici que j’envoie mon messager devant toi. » Ce qui était dit de Yahvé s’appliquer à Jésus lui-même. C’est la révélation de l’unité entre Dieu et ce Jésus qui vit parmi les hommes de Palestine.

Si l’on a présent à l’esprit la force de l’affirmation monothéiste en Israël, le glissement du texte est inimaginable et caractéristique. Cette certitude sera affirmée au pied de la croix : « Vraiment cet homme était le Fils de Dieu. » (Marc 15.39)

Nous aussi nous attendons un messie. Parfois nos contemporains le définissent au travers d’une vague religiosité. C’est en fait Jésus qui est l’essentiel de notre foi. Le christianisme n’est pas religiosité ou morale. Il est adhésion à une personne, celle-là même du Christ.

ENTRAVER NOTRE MARCHE VERS LUI

« Ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils. » Cette démarche doit être vécue en toute liberté, alors que le péché nous y arrête parce que nous lui consacrons du temps et de la complaisance.

Que d’aspérités en nous. « travers dans les terres arides une route aplanie » … ravins, passages tortueux, escarpements …. Il n’est pas besoin de beaucoup voyager pour se rendre compte de ce qu’il a fallu de terrassements, de déblaiements, de remblaiements pour que les autoroutes soient rapides, pour les TGV puissent se dérouler sans risque d’accidents. « Préparez le chemin, aplanissez sa route. »

Isaïe est bien de notre temps quand il demande que le message ne rencontre aucun obstacle : « Monte sur une haute montagne… » C’est bien là que doivent être les antennes des réémetteurs de radios ou de téléphones portables.

Ce texte d’Isaïe doit se lire à deux niveaux. Préparer le chemin pour le peuple de Dieu, non seulement celui de l’Ancien Testament, mais celui de notre époque, l’Eglise, c’est être véritablement « voix du Seigneur », perceptible et audible pour tous et non pas obstacle par une transmission trop humaine, trop sclérosée, trop ritualiste, trop timide, de la Parole de Dieu qui doit sauter par delà les montagnes de la vie, jusqu’à Sion, jusqu’à Jérusalem, jusqu’à nos contemporains.

Le deuxième niveau, c’est le nôtre, notre manière personnelle de vivre cette Bonne Nouvelle, sans l’entraver par nos faiblesses.

L’INTELLIGENCE DU COEUR
qui est celle de l’amour.

C’est l’étrange paradoxe de toute connaissance. Elle ne peut être le fruit d’une déduction rationnelle ou d’un désir de possession. Seul l’amour désintéressé nous fait entrer dans le mystère de tout être. A plus forte raison pour la connaissance chrétienne.

Plus Dieu est connu, plus il se révèle inconnu et nous sommes alors appelés à avancer davantage encore vers Lui et en Lui.

Plus le prochain est aimé, moins nous prétendons le saisir et plus nous sommes appelés à nous donner davantage à lui. En Christ, nous sommes un seul corps, membres les uns des autres. Comme Dieu dont nous sommes l’image, chacun de nous est simultanément secret et amour à respecter. En Christ nous sommes un seul être et pourtant chacun reste une personne, un visage incomparable. Et le devient de plus en plus d’autant que l’amour nous conduit.

Connaître ne peut être qu’une simple acquisition, c’est une rencontre d’êtres vivants qui aspirent chacun à une plénitude. « Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassent » (psaume 84) Il doit en être ainsi en toute relation avec nos frères. Il doit en être ainsi dans notre relation avec Dieu-Trinité.

« Eveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à l’accueillir », dit encore la prière d’ouverture de cette messe de l’Avent.

L’ACCUEILLIR

C’est-à-dire ce que doit être notre relation avec celui qui vient. Le messager d’Isaïe et de l’Evangile, c’est Jean le Baptiste. Il annonce ce Jésus, il vient essentiellement préparer le cœur du Peuple de Dieu à recevoir la nouveauté de la Bonne Nouvelle, par la conversion qui est de reconnaître son péché et de changer sa manière de vivre. Cela signifie qu’il nous faut accepter de reconsidérer notre relation à Dieu, en Jésus-Christ.

Le messager veut faire vivre en vérité. Son message n’est pas un morale, ni même une théologie, mais une vision. Lorsque nous évoquons les choses de Dieu, il nous faut éviter de les amoindrir par nos langages humains, par notre logique terrestre.

Le Dieu des philosophes n’est pas le Dieu vivant. Celui des théologiens ne l’est qu’à moitié. Dans les deux cas, nous le réduisons au concret ou en une doctrine abstraite. Dieu est vie. Et c’est alors que nous devons l’accueillir dans le silence de l’admiration et de l’adoration.

L’accueillir par l’humanité même du Christ, cette humanité déifiée en Jésus et déifiante pour tout homme qui accomplit cette Alliance, « comme l’eau se mêle au vin » pour devenir le vin du Royaume.

ENTRER DANS SA PROPRE VIE

« Vous qui attendez avec tant d’impatience, la venue du jour de Dieu. Un ciel nouveau, une terre nouvelle. » Ceux qui aiment parfaitement Dieu lui ressemblent peu à peu. Car notre nature humaine a été créée avec la capacité d’accueillir la plénitude de la divinité puisque Dieu nous a donné ce qu’il avait de plus précieux pour affirmer son amour : Jésus.

Si nous voulons trouver Jésus dans la plénitude de son être, de sa personne humano-divine, il nous faut le rejoindre et l’atteindre dans sa Passion et dans sa Résurrection. Il nous faut, nous aussi, et comme lui, assumer l’humanité toute entière, assumer notre humanité.

Il nous faut traverser notre vie jusque dans et à travers la mort « Celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus, nous ressuscitera aussi avec Jésus. » (2 Cor. 4. 14) C’est cela notre marche à la rencontre du Christ

Pour que nous puissions entrer dans sa propre vie divine, Dieu est patient. « Comme un berger, il conduit son troupeau. Son bras rassemble les agneaux, il les porte sur son cœur et il prend soin des brebis qui allaitent leurs petits. » (Isaïe. 40. 11) Saint Pierre qui a reçu la mission d’être le pasteur à la suite de Jésus, se rappelle cette parabole du bon berger quand il dit : »Il n’accepte pas d’en laisser quelques-uns se perdre. Il veut que tous aient le temps de se convertir. » (2 Pierre 3. 9)

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« Seigneur tout Puissant et miséricordieux, ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils, mais éveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à l’accueillir et nous fait entrer dans sa propre vie. » (Prière d’ouverture de ce dimanche)

année liturgique B