Homélie du dimanche 10 juillet

Dimanche 10 juillet 2016
Quinzième dimanche du temps ordinaire

Références bibliques :

Lecture du livre du Deutéronome 30. 10 à 14 :” Elle est tout près de toi cette Parole afin que tu la mettes en pratique.”
Psaume 18 : “Le commandement du Seigneur est limpide, il clarifie le regard. »
Lecture de la lettre de saint Paul aux Colossiens : 1. 15 à 20 : “ Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total.” »
Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc : 10. 25 à 37 : “Fais ainsi et tu auras la vie. »

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Nous pouvons centrer notre méditation de ce dimanche sur deux thèmes : celui du prochain avec la parabole du Bon Samaritain et celui de la richesse du Christ qui nous est donnée et que saint Paul développe dans sa lettre aux Colossiens.

L’HYMNE AU CHRIST

Pour quatre dimanches, la liturgie nous propose d’entendre cette Parole de Dieu dans la lettre adressée aux chrétiens de Colosses, ville du centre de l’actuelle Turquie. Paul n’est pas le fondateur de cette communauté. C’est Epaphras, “son ami et son compagnon de service.” Elle est datée de son séjour à Rome, alors qu’il est prisonnier, vers l’an 63, peu d’années avant son martyre.

Cette communauté était menacée de syncrétisme. “Des éléments du monde” interfèrent avec la pureté de la foi que l’on veut rendre plus proche des réalités de la vie et la société dans laquelle se trouvent les chrétiens, même si elles en sont contradictoires. Dans la recherche d’une unité souhaitable, on a parfois tendance à fondre des doctrines différentes en les faisant se rejoindre par des approximations qui veulent les amalgamer les unes avec les autres.

Par exemple, actuellement dans le dialogue interreligieux, nous disons que nous sommes tous les enfants d’un même Dieu et nous regrettons alors de ne pas en parler ni d’en vivre de la même manière. Un seul Dieu, oui, un même Dieu ?…oui et non . Le Dieu de Jésus-Christ est Trinité, vie d’amour du Père et du Fils et de l’Esprit. Cette vitalité trinitaire nous est révélée non par un prophète mais par le Fils de Dieu lui-même fait homme en Jésus-Christ. Cette foi au Christ est inassimilable à la foi musulmane ou à la foi juive pour qui ce mystère est impossible à recevoir quand il parle de Dieu Un.

La bonne volonté peut « écorcher » la vérité.

Pour donner la mesure de la richesse qui est la nôtre dans le Christ, saint Paul insère dans sa lettre cet hymne au Christ « qui dépasse toute créature ». Il est celui qui a tout créé. Il faut dépasser ce que nous avons vu de lui durant sa vie parmi les hommes. “Il est avant tous les êtres et tout subsiste en lui… en lui, toute chose a son accomplissement total, sur la terre et dans les cieux, par le sang de sa croix.” (Colossiens 1. 19 et 20)

IMAGE DE L’INVISIBLE.

Nous retrouvons, dans ce passage, les écrits de Sagesse de l’Ancien Testament : la sagesse de Dieu qui préside aussi bien à la création qu’à l’histoire du salut.

Ici, saint Paul applique au Christ ce qui nous est dit dans le livre de la Sagesse (chapitre 8. 25 et 26), par l’auteur de l’Ancien Testament :”(La Sagesse) est un souffle de la Puissance divine, une effusion toute pure de la gloire du Tout-Puissant. Aussi, rien de souillé ne pénètre en elle. Elle est un reflet de la lumière éternelle, un miroir sans tache de l’activité de Dieu, une image de son excellence.” Il affirme ainsi le primat absolu du Christ sur tout le créé,

Saint Jean a repris ces textes dans le prologue de son Evangile en utilisant le terme “Logos” qui, en grec signifie à la fois, Parole, Pensée et expression réalisatrice de la pensée, et en l’attribuant au Fils. (Jean 1. 1 et ss)

CREATION ET RECONCILIATION

A partir de ce texte biblique et dans le même temps, saint Paul comme saint Jean situent le rôle et la place du Christ dans l’humanité. La Sagesse parmi nous :”Celui qui m’a créé m’a fait dresser ma tente. Il m’a dit : « Installe-toi en Jacob et entre dans l’héritage d’Israël.” (Ecclésiastique 24. 8). Saint Jean nous dit que cette prophétie s’est réalisée :”Le Verbe s’est fait chair et il a dressé sa tente parmi nous.”

Saint Paul l’affirme également. Le monde est marqué par la mort. Le Christ, premier-né d’entre les morts, “la tête du corps, c’est-à-dire de l’Eglise,” fait renaître ce monde en lui redonnant le sens de son unité :”Tout subsiste en lui.” (Colossiens 1. 17)

Tous les êtres, “sur la terre et dans les cieux”, trouvent leur accomplissement en celui qui est la plénitude de Dieu et leur plénitude. “Il a voulu tout réconcilier en faisant la paix par le sang de sa croix.” Nous devons méditer cet hymne au Christ et le faire nôtre en le relisant par rapport à nous-mêmes et à nos frères, lors de cette intimité entre Lui et nous, dans l’Eglise, par cette communion au Corps et au Sang du Seigneur.

Je subsiste en Lui … en Lui, j’ai mon accomplissement total … il doit avoir en tout la primauté. Il subsiste tout autant en mon frère.

LA PARABOLE DU SAMARITAIN

Cette parabole peut être lue comme l’affirmation d’une exigence philanthropique ou l’affirmation d’une exigence caritative. C’est mon frère en humanité.

Elle peut être lue au niveau des deux commandements qui sont les mêmes et dont elle est l’explicitation. Le prêtre et le lévite ne se comportent pas ainsi puisqu’ils donnent priorité au premier en négligeant le second.

Les textes parlent d’eux-mêmes. La loi que nous prescrit le Seigneur n’est pas au-dessus de nos forces. Il n’est pas nécessaire de la chercher loin de nous. Elle n’est ni dans les hauteurs ni dans le lointain au-delà des mers. Elle n’est pas hors d’atteinte, comme le dit le Deutéronome. Elle est là, sur le bord du chemin, nous dit Jésus par la parabole du Bon Samaritain.

La Parole de Dieu est dans nos coeurs afin que nous la mettions en pratique. “Il le vit, fut saisi de pitié, lui panse ses plaies, le conduit à l’auberge et le prend en charge.” Des gestes simples qui ont traduit ce qui est écrit dans la Loi du Seigneur.

Le Seigneur nous indique ce que nous avons à réaliser ainsi chaque jour, dans les situations où nous nous trouvons, si nous voulons mettre en pratique le commandement “Tu aimeras…”

Mais cette parabole trouve une autre plénitude, si nous la mettons dans la perspective paulinienne, celle du Christ qui vit en cet homme. Ce blessé de la route de Jéricho a été créé par Lui et pour Lui. Il subsiste en Lui.

Ce n’est pas une simple fraternité humaine qui nous relie à l’étranger, au blessé de la vie, au demandeur d’asile, à l’isolé solitaire dans un monde qui tourbillonne autour de lui. C’est le Christ qui nous attache à chacun d’eux. Dans notre agir, nous devons tenir compte qu’en eux, le Christ « doit avoir en tout la primauté …Dieu a voulu que dans le Christ tout ait son accomplissement. »

A sa manière, c’est ce que réalise le Samaritain qui ne s’en tient pas à quelques instants. Par delà le premier secours, il va plus loin : “…quand je repasserai.“

“Celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère” comme lui-même, car ce frère ne réalisera son accomplissement total que dans le Christ. A nous d’aider tout homme rencontré sur notre chemin, à retrouver le sens de ce qu’il est :”Que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle ? …Prend soin de lui, toi, aussi, fais de même.”

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En toute eucharistie, nous célébrons ce mystère, nous y participons par la communion. La prière après la communion, en ce dimanche le dit avec des mots tout simples :”Nourris de ton eucharistie, nous te supplions, Seigneur. Chaque fois que nous célébrons ce mystère, fais grandir en nous ton oeuvre de salut.”

Cette oeuvre de salut a la dimension même que nous rappelle la lettre de saint Paul, la dimension du Christ, image du Dieu invisible.

année liturgique B