Homélie pour le dimanche 15 juin 2014

La Sainte Trinité

Références bibliques
Livre de l’Exode. 34. 4 à 9 :”Daigne marcher au milieu de nous.”
Cantique du Deutéronome: 3. 52 à 56 : “Béni soit le nom très saint de Ta Gloire.”
Lettre de saint Paul aux Corinthiens : 2 Cor. 13. 11 à 13 : “Que la grâce du Seigneur Jésus-Christ, l’amour de Dieu et la Communion de l’Esprit Saint soient toujours avec vous.”
Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean : 3. 16 à 18 : “Dieu a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique.”
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A première vue, la fête de la Trinité peut paraître un non-sens liturgique, puisque toute liturgie est en l’honneur de Dieu-Trinité, par le Christ-Notre-Seigneur. Toute liturgie est trinitaire puisqu’elle en rappelle et en exprime le mystère en commémorant chaque événement de la vie du Christ.On ne commémore pas Dieu est qui Père, Fils et Esprit. On ne fête pas l’adoration due à Dieu lui-même, puisque la Trinité est au coeur du mystère de la vie divine et présente en toute liturgie. Chaque eucharistie commence et se termine par le signe de croix en l’honneur des Trois Personnes divines. Le Kyrie, « le Gloire à Dieu », le symbole de la Foi, les prière eucharistiques sont construits sur un rythme trinitaire.Les liturgies orientales accentuent même cette répétition ternaire. Pourtant l’Eglise romaine, au terme des grandes commémorations de la vie du Christ et de la descente de l’Esprit, a voulu nous donner ce dimanche comme un appel pour notre foi vécue en Dieu.

La révélation du mystère trinitaire

Le mystère trinitaire de Dieu ne se trouve affirmé ni dans le judaïsme, ni dans l’Islam. C’est le Christ seul qui a pu nous le révéler, parce qu’il vivait cette Trinité dans l’amour.Cette vérité centrale de notre foi est donc la grande originalité du christianisme. Nous sommes vivant d’un Dieu qui, tout unique qu’il soit, est une « famille » de trois Personnes qui vivent en « Unité » parfaite.Jésus n’a jamais prononcé ce mot de « Trinité » et n’a jamais dit : »Il y a trois personnes en Dieu. » D’ailleurs pourquoi l’aurait-il dit puisque tout au long de l’Evangile de sa vie publique, nous voyons que Jésus vit intimement lié à celui qu’il appelle « son Père » : « Tout ce qui est à moi est à Toi… Tout m’a été donné par mon Père et nul ne connaît le Père sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler. » (Jean 17. 10 et Matthieu 11. 27)Il n’y a aucune confusion entre le Père et lui, dans les termes qu’il emploie. Il parle bien de deux personnes distinctes en même temps que pleinement unie parce qu’elles le sont par la nature même de leur personne.Dans le même temps, et intimement liée à lui et à son Père, il nous parle d’une troisième personne : »Je vous enverrai un autre défenseur : l’Esprit de Vérité. » (Jean 16. 5) Dans le même temps, il vient de déclarer : « Je suis la Vérité. » Cette personne dont parle Jésus n’est ni un prophète ni un propagateur de l’Evangile. Il en parle comme d’une personne divine.

Tel est le mystère de Dieu : à plusieurs, ne faire qu’un ! La vie en famille ne s’enseigne pas d’une manière intellectuelle et abstraite. Elle se vit « au jour le jour » par les gestes, les présences, l’amour attentif. De même Dieu nous a révélé le mystère de sa « famille », de sa vie trinitaire, en la vivant parmi nous, à travers l’Incarnation de son Fils. » « Dieu a tant aimé le monde …. » (Jean 3. 16)

 

Ecriture et théologie

« Je crois en un seul Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles : il est Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu. Engendré non pas créé, de même nature que le Père et par Lui tout a été fait. »Entre la révélation de la montagne du Sinaï (Exode 34. 6 à 9) et la « définition » du Concile de Nicée, le Prologue de saint Jean est un maillon essentiel. Pour lui, il est clair que le Verbe, la Parole qui est l’expression de Dieu, n’est pas une créature de Dieu, puisque par Lui tout a été fait. Il mérite lui-même le nom de Dieu et est impliqué dans l’oeuvre de la création. Il est généré, engendré, en Dieu lui-même.Un des traits les plus curieux que nous donne la liturgie de cette fête de la Trinité, c’est que l’exaltation du Dieu est en même temps la proximité la plus inattendue de l’homme et de Dieu. « Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous. Nous avons vu sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme fils unique, plein de grâce et de vérité. » (Jean 1. 11 à 14)

Au plus profond du mystère

L’unité de Dieu n’est pas une solitude, ni une abstraction.L’existence du Dieu unique peut-être reconnue d’une manière ou d’une autre par presque tous les hommes. Si les révélations anciennes nous le nomment : Allah, Yaveh, le Grand Esprit, ces termes, si chargés de richesses spirituelles qu’ils soient, ne révèlent pas la plénitude de la réalité vécue en Dieu, qui est Père, Fils et Esprit.Il ne faut pas confondre affirmation de l’existence de la réalité trinitaire de Dieu avec les expressions évangéliques.Ce « Dieu -Amour » ne nous a été révélé que par la foi que nous transmet le Christ. . L’échange d’amour entre le Père et le Fils et l’Esprit n’est pas un mystère facultatif que l’on peut mettre de côté quand on parle de Dieu. Cette connaissance, révélée par le Christ, va plus loin et plus profondément.Saint Paul le disait aux Ephésiens, une connaissance dans toutes ses dimensions : la hauteur, la largeur, la longueur et la profondeur. (Ephésiens 3. 18 et 19) On ne peut ni aimer ni s’aimer si on est seul. La solitude n’engendre aucun amour et l’amour du seul soi-même n’est qu’une sorte de narcissisme. Parce qu’il naît d’échange et de don l’amour est nécessairement communion intime de plusieurs personnes.

La Trinité en Dieu est un « secret d’amour » qui, dans la lumière divine, éclaire notre condition humaine : l’homme ne peut exister que s’il est en relation avec les autres et cette relation est constituée par l’amour. C’est là le sens nouveau du commandement « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »

Remarquons qu’au premier livre de la Genèse, nous voyons Dieu donner à l’homme la mission de nommer les créatures, mais l’homme ne nommera pas Dieu. C’est Dieu qui se nommera lui-même devant Moïse comme le rappelle la première lecture de ce dimanche. (Exode 34. 4 à 9)

En se nommant, Dieu ne fait pas « qu’afficher » ce qu’il est, il propose à l’homme une alliance, qui va trouver sa plénitude dans le don de Jésus, donné à l’humanité, don gratuit de son amour. Sa mission consiste à révéler et à réaliser, dans sa mort et sa résurrection, cette alliance et à en proposer l’adhésion à cette relation divine.

« Comme cette eau se mêle au vin pour le sacrement de l’alliance, puissions-nous être unis à la divinité de celui qui a pris notre humanité. » (prière de l’offertoire)

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Au seuil de chaque eucharistie, nous reprenons les paroles de saint Paul qui sont celles de la « logique divine », si l’on peut parler ainsi. C’est par la grâce de Jésus Notre-Seigneur que nous est connu l’amour de Dieu le Père afin que nous puissions vivre en communion en l’Esprit.

Chaque eucharistie nous rappelle aussi l’immédiateté de Dieu quand le prêtre étend les mains sur le pain et le vin au moment de la prière consécratoire : « Toi qui es la source de toute sainteté, sanctifie ces offrandes en répandant sur elle ton Esprit; qu’elles deviennent pour nous le corps et le sang de Jésus, le Christ, notre Seigneur. »

année liturgique B