Rencontre avec l’Eglise évangélique à Erfurt

A Erfurt (Allemagne), dans l’ancien couvent des augustins, le pape Benoît XVI a rencontré le Conseil de l’Eglise évangélique d’Allemagne. Celui-ci regroupe 22 Eglises luthériennes et compte plus de 24 millions de fidèles soit 30% de la population allemande.

Le pape Benoît XVI a été accueilli par le Pasteur Nikolaus Schneider, Président de l’Eglise évangélique d’Allemagne, et par Mme Ilse Junkermann, Evêque de l’Eglise évangélique de Thuringe (Allemagne Centrale). Il l’ont conduit à la salle capitulaire, restée intacte depuis le temps où Luther était moine.

Exprimant son émotion d’Evêque de Rome à se trouver là où Martin Luther a étudié et a été ordonné prêtre en 1507, Benoît XVI a rappelé que « la question de Dieu fut la passion profonde et le ressort de sa vie et de tout son itinéraire. Elle « se trouvait derrière chacune de ses recherches théologiques et de son combat intérieur… Qui, en effet, se préoccupe aujourd’hui de cela, même parmi les chrétiens?… La plus grande partie des gens, chrétiens compris, tient aujourd’hui pour acquis que Dieu, en dernière analyse, ne s’occupe plus de nos péchés et de nos vertus… Aujourd’hui, on croit encore en un au-delà et en un jugement de Dieu, alors presque tous pensent que Dieu doit être généreux, et, qu’à la fin, dans sa miséricorde, il ignorera nos fautes. Mais ces fautes sont-elles vraiment si petites? Le monde n’est-il pas dévasté à cause de la corruption des grands, mais aussi à cause de celle des petits, qui pensent seulement à leurs propres intérêts? N’est-il pas dévasté par le pouvoir des drogues, qui vit du désir de vie et d’argent d’une part, et de l’autre, par l’addiction à la jouissance des personnes qui lui sont adonnées? N’est-il pas menacé par la disposition croissante à la violence qui se revêt souvent de la religiosité? La faim et la pauvreté pourraient-elles dévaster autant de parties entières du monde si, en nous, l’amour de Dieu et, à partir de lui, l’amour pour le prochain, pour les créatures de Dieu, les hommes, étaient plus vivants?… Non, le mal n’est pas une bagatelle. Et il ne pourrait être aussi puissant si nous mettions vraiment Dieu au centre de notre vie…. Quelle est la position de Dieu à mon égard, et comment je me situe moi face à lui? Cette question brûlante de Martin Luther doit redevenir, certainement sous une forme nouvelle, notre question ».

Dieu, le Dieu unique, le Créateur du ciel et de la terre, a poursuivi le Saint-Père, « est quelque chose d’autre qu’une hypothèse philosophique sur les origines du cosmos. Il a un visage et il nous a parlé. En Jésus il est devenu l’un de nous… Mais qu’a à voir tout cela avec la situation œcuménique? Tout cela n’est peut-être seulement qu’une tentative d’éluder, avec tant de paroles, les problèmes urgents dans lesquels nous attendons des progrès pratiques, des résultats concrets ? A ce sujet, je réponds : la chose la plus nécessaire pour l’œcuménisme est par-dessus tout que, sous la pression de la sécularisation, nous ne perdions pas presque par inadvertance les grandes choses que nous avons en commun, qui en elles-mêmes nous rendent chrétiens et qui sont restées comme don et devoir. C’était l’erreur de l’âge confessionnel d’avoir vu en majeure partie seulement ce qui sépare, et de ne pas avoir perçu de façon existentielle ce que nous avons en commun dans les grandes directives de l’Ecriture et dans les professions de foi du christianisme antique. Le grand progrès œcuménique des dernières décennies est que nous nous soyons rendu compte de cette communion et que nous pouvons la reconnaître comme notre fondement impérissable ».

Face au dynamisme missionnaire des Evangéliques

« Devant une forme nouvelle de christianisme, qui se diffuse avec un immense dynamisme missionnaire, parfois préoccupant dans ses formes, les Églises confessionnelles historiques restent souvent perplexes. C’est un christianisme de faible densité institutionnelle, avec peu de bagage rationnel et encore moins de bagage dogmatique et aussi avec peu de stabilité. Ce phénomène mondial nous place tous devant la question de savoir ce qu’est cette nouvelle forme de christianisme… Qu’est-ce qui demeure valable, peut ou doit être changé, par rapport à la question de notre choix fondamental dans la foi… Le second défi pour la chrétienté tout entière est la sécularisation du monde, dans lequel nous devons vivre et témoigner aujourd’hui notre foi. L’absence de Dieu dans notre société se fait plus pesante, l’histoire de la Révélation…semble reléguée dans un passé qui s’éloigne ». Voilà pourquoi « la foi doit être repensée et surtout vécue d’une manière nouvelle… Si l’édulcoration de la foi ne peut pas nous venir en aide, la tâche centrale est de la vivre entièrement au quotidien. Et c une tâche œcuménique centrale. En cela nous devrions nous entraider à croire de façon plus profonde et plus vivante. Ce ne seront pas les tactiques qui nous sauveront, qui sauveront le christianisme, mais une foi repensée et vécue d’une façon nouvelle, par laquelle le Christ, et avec lui le Dieu vivant, entre dans notre monde… Vécue au plus profond de nous, dans un monde sécularisé, la foi demeure la force œcuménique la plus forte qui nous réunit, nous guidant vers l’unité dans l’unique Seigneur ». Après ce discours, le Pape a visité l’ancienne église conventuelle pour une cérémonie oecuménique.

Source : VIS du 23 septembre 2011

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