Mgr Berthet : « Riga est un laboratoire de rencontre œcuménique »

didier_berthet_portraitEvêque de Saint-Dié, Mgr Didier Berthet était à Riga, en Lettonie, pour la rencontre européenne de Taizé (28 décembre 2016-1er janvier 2017). Il y a notamment animé un atelier sur l’œcuménisme aujourd’hui.

Quel est votre lien avec la Communauté de Taizé ?

Lycéen, je suis allé à Taizé. En tant que jeune curé de paroisse à Rueil-Malmaison, j’ai accueilli les participants de la rencontre européenne à Paris, en 1994. Cela reste un souvenir émouvant : des dizaines de milliers de jeunes quittaient pour la première fois les pays de l’Est. C‘était très fort. Puis quand j’étais à Anthony, j’ai accompagné des jeunes à Barcelone (Espagne, 2000), Zagreb (Croatie, 2006) et Rotterdam (Pays-Bas, 2010). J’aime beaucoup les rencontres européennes de Taizé : j’appelle cela « les petites JMJ d’Europe ». Je trouve cela très beau. J’aime l’ambiance et la pédagogie spirituelle de Taizé. Je m’y suis rendu pour la Toussaint avec un groupe de jeunes. Je vois aussi des frères à l’occasion de rencontres oecuméniques. Je m’intéresse beaucoup à la rencontre avec le christianisme slave d’Orient (Russie, Ukraine). Ces dernières années, j’ai participé très régulièrement à des rencontres en Ukraine.

Que retenez-vous de Riga ?

Ce qui taize_riga_2016_villeest intéressant, c’est d’aller à la rencontre d’un pays balte. Ces petits pays n’ont pas beaucoup de poids, ni démographique ni économique mais ils comptent symboliquement. Ils ont repris leur liberté après la chute de l’Union soviétique. Ils se retrouvent dans leur identité nationale, une identité un peu plurielle – avec un fond letton mais aussi la présence d’une minorité russophone importante, avec les questions culturelles et politiques que cela pose. Ces pays sont situés à la frontière de la Russie actuelle, zone d’échanges et de tensions. On pense notamment à ce qui se vit à l’Est de l’Ukraine. Cela a des répercussions sur ces pays qui se sentent sous pression, voire menacés. En même temps, ils ont été très rapides dans l’intégration à l’Europe : ils sont maintenant dans la zone Euro.

D’un point de vue œcuménique, La Lettonie compte une petite minorité de Luthériens, une forte minorité catholique et une autre orthodoxe. C’est un peu un laboratoire de rencontre œcuménique. On sent des pays à la croisée de trois mondes : slave, scandinave et germanique. Les pays baltes font partie de la civilisation de « la Hanse » : ces ports de la Mer du Nord et de la Baltique qui forment, depuis le Moyen Age, une même zone d’échanges et de culture. Les Lettons étaient fiers de nous accueillir, de montrer le dynamisme de leur pays et de leurs Eglises.

Comment avez-vous pris part à ces journées ?taize_riga_2016_orthodoxe

Contrairement aux Journées Mondiales de la Jeunesse (JMJ), les identités nationales sont peu marquées lors des rencontres de Taizé. Les jeunes sont tous européens. On va ensemble à l’essentiel. On se découvre dans les groupes de partage. Celui du 1er jour sur l’espérance était très fort. Je suis intervenu pour apporter un éclairage sur la différence entre « nos espoirs » et « notre espérance ». Nos espoirs sont tout à fait légitimes. Ils ont pour fond l’espérance qui a pour objet le Seigneur lui-même, son royaume, la vie, y compris la vie éternelle. J’ai aussi pris la parole lors de la rencontre des Français, le 3ème jour. J’ai animé un atelier sur la situation de l’œcuménisme aujourd’hui. Mgr Denis Moutel, évêque de Saint-Brieuc et Tréguier, a expliqué aux jeunes le texte des évêques, « Retrouver le sens du politique ». Mgr Georges Colomb, évêque de La Rochelle et Saintes, a parlé de la mission. Le Père Didier Noblot, directeur adjoint du Service national pour l’Evangélisation des Jeunes et pour les Vocations (SNEJV), avait pour thématique la vocation.

taize_riga_2016_priereQuel regard portez-vous sur la relation entre frère Alois, prieur de Taizé, et les jeunes ?

Dans les rencontres de Taizé, ce n’est pas tellement une prédication qui est faite aux jeunes. Les frères sont au centre mais on regarde dans le même sens, on prie avec eux. Je me souviens d’une belle méditation sur les charismes. Les dons sont variés mais c’est le même Esprit Saint, c’est la même foi. L’Eglise est une communion de charismes. Cette spiritualité des charismes, des dons de l’Esprit, je l’ai reprise à mon compte dans ma catéchèse sur l’œcuménisme.

Je recommande un film que j’ai vu sur Frère Roger, fondateur de la Communauté. Il retrace comment les frères se sont toujours sentis appelés à se situer sur les lignes de fracture, à travers la prière pour l’unité des chrétiens, pour la réconciliation. On voit que dans les années 60, les jeunes sont venus frapper à la porte de Taizé. Ils ont poussé la Communauté à s’ouvrir à leurs questions et à leurs aspirations. Pour moi, deux mots définissent le charisme de frère Roger : « confiance » et « simplicité ».

L’un des charismes de Taizé est l’expérience de l’intériorité, à travers la prière. Mais à Taizé, elle n’est jamais considérée pour un refuge un peu spiritualisant. Les frères renvoient toujours les jeunes à leur vie, à un engagement à faire vivre le monde et leur Eglise. C’est une expérience de communion avec le Christ et de communion d’Eglises. Ils envoient les jeunes en mission, être artisans de paix là où ils sont. Frère Alois et la communauté ont beaucoup encouragé  les jeunes à l’engagement en faveur des pauvres et des réfugiés en particulier, à aider notre continent européen  ne pas céder à la peur ou à l’indifférence. Et moi, en tant qu’évêque, ces journées m’ont rajeuni spirituellement !

taize_riga_2016De l’oecuménisme

« La recherche de l’unité consiste à avancer vers la plénitude catholique, de la foi et de la vie de l’Eglise », poursuit Mgr Berthet. Certains dons sont assez apparents dans nos différentes Eglises, estime-t-il. Amour de la Parole de Dieu et puissance de la prédication, sens de la liberté et de la responsabilité du chrétien dans le monde chez les Protestants ; sens de la beauté, de la louange et de la gloire à travers la liturgie chez les Orthodoxes ; charisme d’unité avec ce lien fort entre le Pape et les évêques pour l’Eglise catholique romaine.

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