Des migrants mineurs de Calais accueillis par Apprentis d’Auteuil

migrants_mineurs_apprentis_auteuilDouze jeunes issus du démantèlement de la « Jungle » de Calais ont été accueillis le 2 novembre dernier au sein des établissements Notre-Dame, d’Apprentis d’Auteuil, à 35 km de Chartres. Une expérience humaine très forte qui fait écho au thème de réflexion et de prière choisi par le pape François pour la 103e Journée mondiale du migrant et du réfugié, ce 15 janvier 2017 : « Mineurs migrants, vulnérables et sans voix ». Par Florence de Maistre.

« Le préfet m’a appelé pendant les vacances de la Toussaint pour savoir si je pouvais recevoir des migrants mineurs du camp de Calais. J’avais quelques places disponibles en MECS [Maison d’enfants à caractère social]. Dès le lendemain, nous avons accueilli 12 jeunes dans l’urgence. L’urgence était surtout de leur côté », rapporte Christian Jacquemin, directeur du territoire Centre d’Apprentis d’Auteuil.

Les établissements Notre-Dame, installés au château des Vaux, près de La Loupe, en Eure et Loir, regroupent quatre MECS, soient 360 enfants et jeunes confiés par l’Aide sociale à l’enfance, un internat éducatif et scolaire de 260 jeunes, un collège, un lycée professionnel des métiers de bouche et du bâtiment, un lycée horticole. Plus de 780 enfants et jeunes de 6 à 21 ans fréquentent le site, dont une centaine de mineurs non accompagnés (MNA). « Les jeunes en difficultés sont au cœur de notre métier, au cœur de notre mission d’Église. Avec les Calaisiens, j’ai d’abord répondu à une détresse humaine », précise Christian Jacquemin.

Des morceaux de miroir cachés dans leurs vêtements pour se défendre

« Avant tout, il s’agit d’adopter toutes les mesures possibles pour garantir aux migrants mineurs protection et défense », indique le pape François dans son message pour la Journée mondiale du migrant et du réfugié 2017. Pour ces jeunes, dix Soudanais, un Érythréen et  un Égyptien, priorité à l’hygiène et aux soins médicaux. Des chambres individuelles avaient été prévues, mais les jeunes de 16 – 17 ans préfèrent être à deux. « Cela révèle quelque chose de leur sentiment d’insécurité », souligne le directeur des établissements Notre-Dame. Tout comme les morceaux de miroir cachés dans les vêtements pour se défendre. « Chacun a pu déposer son fardeau auprès de psychologues, échanger sur son parcours de migrant, sa souffrance d’avoir vu ses parents égorgés ». Une personne parlant couramment arabe a été recrutée pour faciliter le travail d’accompagnement en toute quiétude, au plus près des besoins des jeunes.

Tous n’ont qu’un projet : rejoindre l’Angleterre. Tous attendent de savoir s’ils seront éligibles pour traverser la Manche. Le 7 décembre, les autorités anglaises donnent leur réponse : six jeunes voient leur projet aboutir. Les autres restent au château des Vaux. « Nous n’avons pas connaissance des critères de décision. Nous essayons d’aider les jeunes à apprendre à accepter. Nous les accompagnons pour imaginer avec eux, dans l’échange, un autre possible », poursuit Christian Jacquemin. Tenter un recours auprès de l’Angleterre ? La démarche est incertaine. Surtout, elle retarde toute autre construction de projet ici et maintenant. Les migrants ont la possibilité de faire une demande de droit d’asile. Dans le petit groupe, deux seront majeurs en février. S’ils demandent l’asile, ils seront redirigés vers les centres d’accueil pour adultes. Les quatre plus jeunes basculeront dans le droit commun des MNA. « Espérons qu’ils aient la chance de rester ici, pour développer et poursuivre notre accompagnement », souhaite le directeur des établissements Notre-Dame.

Donner aux jeunes de nouvelles perspectives

photos_apprentis_auteuil_migrants_mineursActivités sportives, apprentissage du français, découverte des métiers, visite de la capitale, les équipes du château des Vaux ne ménagent pas leurs efforts donner aux jeunes de nouvelles perspectives. Dans les foyers des MECS, les Calaisiens rencontrent d’autres MNA, échangent sur les parcours des uns et des autres, créent de nouveaux liens. « Il s’agit ni de faire miroiter l’impossible ni de s’apitoyer sur leur sort. L’accompagnement éducatif demande de trouver le bon curseur avec une part de vigilance », relève Christian Jacquemin.

Le temps de l’accueil et celui de la mise en sécurité ont provoqué un bel enthousiasme et un élan de solidarité au sein des équipes éducatives. Les jeunes ont pu poser leurs valises, se décharger. Le directeur s’étonne encore du nombre de remerciements reçus et évoque aussi les échanges qui se poursuivent par sms avec les Calaisiens qui ont rejoint l’Angleterre. Reste maintenant le temps de « l’envol » et de l’intégration. « On n’imagine pas à quel point les migrants mineurs sont vulnérables, à quel point leurs parcours sont dangereux », livre Christian Jacquemin. De ponctuer : « Tout est parti d’une injonction du gouvernement. Je salue la capacité des partenaires (préfecture, département, mairies, services de l’Aide sociale à l’enfance, Sécurité civile) à se mobiliser pour répondre à une détresse. Le devoir s’est pour beaucoup transformé en une attention particulière. Je bénis le Ciel de me donner à vivre cette expérience extrêmement enrichissante de notre humanité. »

Message du Pape pour la Journée mondiale du Migrant et du Réfugié 2017 JMMR2017

 » (…) Je souhaite vous adresser un mot, à vous, qui cheminez aux côtés des enfants et des adolescents sur les routes de l’émigration : ils ont besoin de votre précieuse aide, et l’Église aussi a besoin de vous et vous soutient dans le généreux service que vous rendez. Ne vous lassez pas de vivre avec courage le bon témoignage de l’Évangile, qui vous appelle à reconnaître et à accueillir le Seigneur Jésus présent dans les plus petits et les plus vulnérables. »

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