Oscar Romero, bienheureux défenseur des pauvres et de la justice

Mgr Oscar ROMEROMgr Paglia, Président du Conseil pontifical pour la famille et postulateur de cette cause de béatification, a évoqué la vie, l’oeuvre et le martyre d’Oscar Arnulfo Romero y Galdámez, l’archevêque de San Salvador (photo), assassiné en 1980. Le Pape François a reconnu hier qu’il est mort en haine de la foi.

« C’est un don extraordinaire pour toute l’Eglise en ce début de millénaire que de voir sanctifié un pasteur ayant offert sa vie pour son peuple, a estimé Mgr Vincenzo Paglia. Il est un exemple pour tous les chrétiens, comme en témoigne l’Eglise anglicane qui a placé sa statue sur la façade de la cathédrale de Westminster aux côtés de celles du Pasteur Martin Luther King et du Pasteur Dietrich Bonhoeffer. Il est aussi un symbole pour la société tout entière qui voit en lui un champion des pauvres et de la paix. Notre gratitude doit également aller à Benoît XVI, qui a suivi l’affaire depuis le début et qui, le 20 décembre 2012 a décidé de débloquer la procédure canonique. Le travail de la Congrégation pour les causes des saints…a été attentif et précis. A l’unanimité de la commission des cardinaux et de la commission des théologiens, le martyre a été confirmé comme subi en haine de la foi. Le martyre de Mgr Romero a donné espoir et force aux nombreuses familles salvadoriennes qui avaient perdu des parents et des amis durant la guerre civile. Son souvenir est devenu immédiatement celui des autres victimes, moins connues. Après un long processus qui a connu beaucoup de difficultés et même des oppositions à propos de la pensée et de l’action pastorale du prélat. Enfin a été résolu le climat conflictuel qui s’était créé autour de sa figure. Désormais, Mgr Romero devient comme le premier d’une longue liste de nouveaux martyrs contemporains. Le 24 mars, jour de sa mort, sera pour la Conférence épiscopale italienne une Journée de prière pour les missionnaires martyrs. Les Nations-Unies ont pour leur part proclamé la Journée internationale pour le droit à la vérité en rapport aux graves violations des droits humains fondamentaux et de la dignité des victimes. Le monde a beaucoup changé depuis ce lointain 1980, mais le pasteur d’un petit pays d’Amérique centrale, continue de parler avec force. Et il est significatif que sa béatification ait lieu alors que la chaire de Pierre est, pour la première fois dans l’histoire, occupée par un latino-américain qui veut une Eglise pauvre pour les pauvres. C’est là une coïncidence providentielle.

Défenseur des pauvres contre la répression féroce
Oscar Romero croyait dans sa mission d’évêque. Il et se sentait responsable des gens, surtout des plus pauvres. C’est pourquoi il se chargea de leur sang, de leurs souffrances en dénonçant causes et coupables lors de ses prédications charismatiques du dimanche sur la radio nationale. On pourrait dire que c’était une conversion pastorale dans laquelle il se chargeait d’une force indispensable face à la crise qui affectait le pays. Il se fit le défenseur des gens, dans la tradition des pères de l’Eglise, qui ont défendu le clergé persécuté, protégé les pauvres et défendu le droit des personnes. Au Salvador, le climat de persécution était palpable, et Mgr Romero n’a pas hésité à devenir le défenseur des pauvres contre la répression féroce. Après deux ans d’épiscopat à San Salvador, Mgr Romero avait perdu trente de ses prêtres, tuées, expulsés ou renvoyés pour échapper à la mort. Les escadrons de la mort ont également assassiné des dizaines de catéchistes et de nombreux fidèles des communautés de base ont disparu. L’Eglise a été la principale accusée, mais aussi la plus attaquée. Oscar Romero a résisté et a accepté de donner sa vie pour défendre son peuple.
Il a été tué à l’autel, car ses bourreaux voulaient blesser l’Eglise rénovée par Vatican II. Sa mort a été causée non seulement par des motifs politiques mais surtout par la haine envers une foi caritative luttant contre les injustices qu’on faisait pleuvoir impitoyablement et cruellement sur les pauvres et leurs défenseurs… Sa mort à l’autel…constituait pour ses assassins un symbole, un terrible avertissement à quiconque voulait agir dans ce sens. Jean-Paul II, qui connaissait très bien les deux autres saints morts sur l’autel, Stanislas de Cracovie et Thomas de Canterbury, a souligné qu’Oscar de San Salvador avait été tué au moment le plus saint, au cours de l’acte le plus divin…en offrant l’Eucharistie. Il a plusieurs fois répété haut et fort que Romero est nôtre, que Romero est l’Eglise. Romero a toujours aimé les pauvres…. Il fut accusé de communisme parce qu’il demandait aux riches des salaires équitables pour les agriculteurs du café. Il répondit qu’en agissant ainsi, c’est eux qui…ont ouvert la porte au communisme. (…) Mettre les pauvres au centre des préoccupations pastorales de l’Eglise et donc aussi de tous les chrétiens, y compris les riches, était la nouvelle forme de la pastorale. L’amour préférentiel pour les pauvres, non seulement n’a pas étouffé l’amour de Romero pour son pays, mais, au contraire, a-t-il soutenu. En ce sens, Romero n’était pas un homme de parti (…) mais un pasteur qui voulait le bien commun de tous, mais des pauvres. Il n’a jamais cessé de chercher le moyen de pacifier son pays.

Homme de Dieu et de prière
Avant tout Mgr Romero était un homme de Dieu, un homme de prière, obéissant à l’amour envers autrui. Il priait beaucoup et était dur pour lui-même, attaché qu’il était à une spiritualité traditionnelle faite de sacrifices. Il fut linéaire en dépit d’un caractère difficile, strict avec lui-même et sans compromis. Si sa vie spirituelle fut tourmentée, la prière était son repos, sa paix et sa force. Ce fut un évêque fidèle au Magistère. Ses écrits montrent clairement familiarité avec les documents de Vatican II, Medellin et Puebla, avec la doctrine sociale de l’Eglise et les autres textes pontificaux. On a souvent dit qu’Oscar Romero avait été subjugué par la théologie de la libération. Quand un journaliste lui a demandé s’il adhérait à la théologie de la libération, il avait répondu: Oui, bien sûr, mais il y a deux théologies de la libération. Une ne voit que la libération matérielle. L’autre est celle de Paul VI et moi je suis avec Paul VI ».

Source : VIS du 4 février 2015.

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