Message de Mgr Jean-Michel di Falco Léandri

« Les médias : au carrefour entre rôle et service. Chercher la Vérité pour la partager. »

« La Vérité vous rendra libres »

« Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons contemplé de nos yeux, ce que nous avons vu et que nos mains ont touché, le Verbe, la Parole de Vie […], nous vous l’annonçons, à vous aussi, pour que vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Et nous, nous sommes en communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. C’est nous qui écrivons cela afin que nous ayons la plénitude de la joie » (1 Jn 1,1-3).

La vie humaine se construit dans la relation, se nourrit de communication, est communion. Tout l’édifice repose sur la confiance. On croit ce que l’autre dit parce qu’on a confiance en lui. On a confiance en lui parce qu’on sait qu’il n’a pas le désir de tromper même s’il est faillible. Par la confiance donnée, la prise de parole sait faire toute sa place à l’écoute de l’autre, la relation s’exempte de toute manipulation, la liberté de chacun et le respect de l’autre deviennent les maîtres mots. La communication se nourrit alors de la vérité. La relation devient communion, union respectueuse du parcours et de l’intime de chacun.

Ce qui vaut des relations entre les personnes vaut tout autant pour la société toute entière. Liberté et respect président aux lois régissant la presse et les médias. La loi du 30 septembre 1986 sur l’audiovisuel, par exemple, souligne que « la communication audiovisuelle est libre. [Mais que] l’exercice de cette liberté [est] limité […] par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion et […] la sauvegarde de l’ordre public ». C’est pourquoi l’Eglise se réjouit du talent des journalistes et des professionnels de la presse comme de leur créativité éditoriale donnant corps à cette exigence éthique : sans l’apport des médias « il serait vraiment difficile de donner un souffle universel aux dialogues de paix, de garantir à l’homme le bien primordial à l’information » (Benoît XVI, Message pour la 42ème journée mondiale des communications sociales, 4 mai 2008). L’Eglise s’associe à toutes celles et tous ceux qui défendent la liberté de la presse au même titre qu’elle défend la liberté religieuse. L’une comme l’autre de ces libertés demandent un libre accès de tous à la vérité, l’une comme l’autre revendiquent la liberté d’expression, l’une comme l’autre demandent d’être librement exercées du moment qu’un ordre public juste est respecté et que le Bien commun donne sens au vivre ensemble (cf. Concile Vatican II, Dignitatis humanae, 2).

Souligner l’exigence de la liberté et du respect dans une pleine reconnaissance de l’altérité comme la condition de tout dialogue fécond, c’est se faire témoin jusqu’au bout de la vérité dans la reconnaissance de la dignité de la personne, au point que s’agissant des médias l’on peut souligner « qu’un certain nombre de gens pensent qu’une « info-éthique » est aujourd’hui nécessaire, de la même façon qu’il existe la bioéthique en médecine et dans la recherche scientifique liée à la vie » (Benoît XVI, Message pour la 42ème journée mondiale des communications sociales, 4 mai 2008).

C’est tout autant tracer le chemin qui nous conduit, chrétiens, à l’impératif intérieur de ne pas garder pour nous seuls la foi qui anime et éclaire la vie. Le chrétien serait infidèle à sa foi s’il n’offrait au monde ce qui le libère. Il ne peut pas garder le don de l’Evangile, don d’amour et de vérité, uniquement pour lui-même. Il doit l’offrir. L’apôtre Jean, dès le début de l’Eglise, témoigne que si l’être humain est un être de relation, de communication, de communion, c’est parce que Dieu l’est lui-même et qu’il nous appelle à communier à sa vie. Comment alors ne pas proclamer cette Bonne nouvelle sur les toits ? Comment ne pas partager une telle foi, une telle espérance, un tel amour avec toutes et tous ? On comprendra alors que le chrétien veuille témoigner de sa foi, et que ce serait lui faire violence que de l’en empêcher. Dans un monde en quête de sens, nous voulons témoigner que la vérité est Jésus-Christ, et que cette vérité rend libre. « La vérité qui nous rend libres est le Christ, car lui seul peut répondre à la soif de vie et d’amour qui est dans le cœur de l’homme » (Benoît XVI, Message pour la 42ème journée mondiale des communications sociales, 4 mai 2008) : nous en faisons chaque jour l’expérience.

Mais en son nom même nous nous interdisons d’imposer à quiconque cette vérité d’amour. Dialogue respectueux et affirmation de la foi sont pour nous profondément compatibles, mieux ils s’appellent mutuellement. Comment en effet pourrions-nous ne pas être respectueux de la liberté des autres, puisque Dieu respecte la nôtre ? Communiquer avec les femmes et les hommes d’aujourd’hui, être pleinement présent dans l’univers médiatique, ce n’est pas vouloir asséner notre foi à tout prix. Pour nous chrétiens, annoncer l’Evangile n’est pas imposer mais proposer, l’acte de foi étant de par sa nature un acte libre : « les uns exposent aux autres la vérité qu’ils ont trouvée ou pensent avoir trouvée, afin de s’aider mutuellement dans la quête de la vérité ; la vérité une fois connue, c’est par un assentiment personnel qu’il faut y adhérer fermement » (cf. Concile Vatican II, Dignitatis humanae ).

Témoigner c’est d’abord se convertir soi-même, c’est avoir l’audace d’être présent au monde avec le ferment de la foi en laissant Dieu agir où Il veut, c’est proposer à ceux qui le souhaitent, par un échange dans la confiance, la liberté et le respect, comme par les moyens de communication, de connaître et de suivre le Christ.

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